
Paris, le jeudi 9 juin 2016 – Après la séance houleuse de la semaine dernière marquée par l’annonce d’une hausse du C de 23 à 25 euros, l’Assurance maladie et les syndicats représentant les médecins libéraux ont connu une rencontre plus apaisée hier, bien que les incertitudes et attentes demeurent nombreuses. L’Assurance maladie a dévoilé sa proposition de mettre en place quatre niveaux de consultation, proposition qui fait écho à la revendication défendue de longue date par la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) et qui a été reprise par l’ensemble des organisations.
Patient vu en urgence : 15 euros de majoration
Le tarif de base atteindrait 25 euros pour l’ensemble des praticiens de secteur 1 et les adhérents au contrat d’accès aux soins, même si demeureront appliquées certaines majorations uniquement accessibles aux psychiatres ou neurologues. Un second pallier concernerait les « actes coordonnés ». Dans ce cadre, l’Assurance maladie propose la création d’une majoration de 15 euros à destination des praticiens spécialistes s’ils acceptent de recevoir dans les quarante-huit heures un patient adressé par un généraliste. Ce dernier pourrait pour sa part appliquer une majoration de 3 euros quand il adresse un malade en urgence à un confrère spécialiste. Il s’agirait ici notamment de désengorger les services d’urgence.
Consultations longues approfondies et consultations complexes : des cadres à préciser
Les « consultations longues approfondies » constitueraient un troisième niveau. Il s’agirait par exemple des consultations de sortie d’hôpital, celles dédiées à certains dépistages (mélanome notamment) ou encore la prescription d’appareillage. De nouvelles discussions doivent avoir lieu pour déterminer avec plus de précision les consultations qui entreront dans ce cadre. De même les négociations devront préciser celui des consultations « très complexes », soit le quatrième niveau. Ces dernières « ne peuvent (…) s’adresser qu’à un nombre limité et défini de prises en charges » a déjà averti l’Assurance maladie qui pourrait faire entrer dans cette classe la mise en place d’un traitement contre le cancer ou contre une maladie neuro-dégénérative.
Un budget toujours pas dévoilé
Au-delà de ce schéma, l’Assurance maladie, à l’exception de l’évocation de la majoration de 15 euros, n’a donné aucun chiffre sur le montant des paliers. La CSMF avait pour sa part proposé des tarifs de 25, 30, 50 et 75 euros. De tels niveaux représenteraient un coût entre 300 et 400 millions d’euros selon le Figaro, auxquels s’ajouterait la revalorisation du C. En l’absence de précision sur l’enveloppe budgétaire dont dispose l’Assurance maladie, difficile de déterminer si ces revendications des organisations pourront être satisfaites. Par ailleurs, de nouvelles discussions sont nécessaires pour déterminer si les actes techniques pourront eux aussi bénéficier de nouvelles cotations, ce qui représente la priorité de plusieurs spécialités, représentées notamment par le Bloc. Le sort du secteur 2, que l’Assurance maladie paraît de plus en plus vouloir marginaliser, doit également faire l’objet de nouvelles discussions.
Après les spécialistes, des généralistes déçus
Pour l’heure, de plus en plus impatients de disposer d’indications chiffrées (qui pourraient être dévoilées la semaine prochaine), les syndicats ont accueilli avec prudence les nouvelles propositions de l’UNCAM. La reprise de l’idée de hiérarchisation des consultations satisfait, mais la majoration de 15 euros fait tiquer. « Quinze euros de majoration, c’est très insuffisant au regard de ce que l’on fait économiser à l’Assurance maladie par rapport à ce que cela coûterait si le patient était envoyé aux urgences » a ainsi fait observer Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Mais ce qui suscite le plus de réticences est le fait que trois niveaux sur quatre ne seraient a priori accessibles qu’aux seuls spécialistes. Pour le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) qui assistait hier aux négociations en tant qu’observateur, c’est une lourde déception. « Notre sentiment est, que malgré sa marge de manœuvre, l’Assurance maladie n’a aucunement l’intention de remédier à l’iniquité tarifaire - et donc statutaire - qui touche la médecine générale. Les médecins généralistes seraient, ainsi, toujours privés des majorations que les autres spécialistes pourraient appliquer, sans aucun rapport avec la réalité ou la complexité de leur activité », déplore l’organisation.
Où l’on reparlera (ou pas) du tiers payant
Les discussions à venir seront donc cruciales pour permettre à l’Assurance maladie d’emporter la conviction encore très incertaine des syndicats, alors que la semaine prochaine sera également marquée par le boycott par quatre syndicats sur cinq de la réunion prévue au ministère pour l’installation du comité dédié au tiers payant. Seul MG France a décidé de répondre à l’invitation mais pour « redire son opposition à l’obligation et ne pas laisser les discussions avoir lieu en l’absence de représentant des médecins » précise le syndicat dans un communiqué.
Aurélie Haroche