Elargissement du tiers payant : ça commence très mal !

Paris, le mardi 5 juillet 2016 – Depuis le 1er juillet, on le sait, les médecins peuvent proposer à leurs patients relevant du régime Affection longue durée (ALD) ou aux femmes enceintes à partir du sixième mois de grossesse de bénéficier d’une dispense d’avance de frais. Ce mode de paiement, déjà appliqué par un certain nombre de praticiens pour ce type de patients, deviendra un "droit opposable" à partir du 1er janvier 2017. Les syndicats de médecins libéraux sont hostiles à cette évolution et plusieurs ont appelé au "boycott" de cet élargissement, invitant les praticiens à apprécier "au cas par cas" comme auparavant la nécessité de l’utilisation du tiers payant.

Des médecins payés deux fois, des patients pas remboursés !

L’Assurance maladie semble ne pas avoir voulu laisser aux médecins le loisir de choisir. Le GIE Sesame-Vitale a proposé aux gestionnaires des logiciels utilisés par les praticiens pour leur télétransmission et leur facturation une mise à jour qui vise à appliquer automatiquement le tiers payant aux patients en ALD et aux femmes enceintes. La plupart des logiciels ont adopté cette modification. Cependant, les médecins ignoraient pour la plupart cette évolution forcée, activée dès lors que le logiciel a été actualisé. Aussi, les mauvaises surprises ont commencé à se faire jour ce week-end. Des praticiens ont constaté que des patients auxquels ils avaient demandé le règlement de leurs honoraires s’étaient parallèlement vus appliquer le tiers payant au moment de l’enregistrement de la carte vitale ! « Vendredi soir, je me suis rendu compte que j'avais trois chèques en trop. En vérifiant sur mon logiciel, j'ai vu que trois patients en ALD avaient été automatiquement facturés en tiers payant, alors que je leur avais fait régler la consultation. Si je ne m'en étais pas rendu compte, ils n'auraient pas été remboursés et moi j'aurais été payé deux fois » a raconté le docteur Gilles Urbejtel, généraliste dans les Yvelines dans les colonnes du Parisien. Le praticien a donc dû remettre leurs chèques aux patients, soulagés que l’avarie n’ait pas concerné des malades ayant acquitté leur consultation en carte bleue.

Surcharge administrative : des appréhensions plus que justifiées !

Très vite après cette découverte, le syndicat MG France est monté au créneau pour dénoncer ce dysfonctionnement, qui pourrait concerner une grande partie des praticiens. Alors qu’un des motifs d’hostilité des médecins à la généralisation du tiers payant concerne le risque de surcharge administrative, ce lancement est loin d’apaiser leurs préventions, tandis que les patients, censés être les grands bénéficiaires de cette mesure, sont en réalité parfois pénalisés ! Par ailleurs, les représentants des médecins libéraux déplorent ce coup de force de l’Assurance maladie, qui n’a nullement tenu compte de la possibilité pour les praticiens, tout au moins jusqu’au 1er janvier 2017, de s’opposer à cette évolution. MG France dénonce ainsi une « décision unilatérale inacceptable ».

Monde à l’envers

Du côté de l’Assurance Maladie, on se défend d’avoir nourri des intentions cachées, mais on reconnaît une volonté d’anticipation. Les représentants de l’UNCAM ont précisé que cette modification avait été signalée lors d’un comité technique paritaire en mai 2016 et que cette annonce n’avait suscité aucune remarque ! L’UNCAM considère donc comme un consentement l’absence d’interrogations après la délivrance d’une information technique et pointue, au milieu d’une réunion touffue. Enfin, l’Assurance maladie indique que les médecins peuvent manuellement "débrayer" l’automaticité du tiers payant. La manipulation risque cependant de ne pas être évidente pour tous les praticiens et représentera une nouvelle tâche, quand il avait été promis que le tiers payant ne devait entraîner aucune surcharge. Surtout, elle s’impose alors que c’est la logique inverse, l’activation du système pour les médecins souhaitant appliquer le tiers payant avant le 1er janvier 2017, qui aurait dû être observée.

Aurélie Haroche

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Vos réactions (5)

  • Inadmissible !

    Le 05 juillet 2016

    Pour ma part, je ne me suis pas précipité pour mettre à jour mon logiciel.

    Je trouve également inadmissible qu'un fournisseur de logiciel dont nous sommes les clients, et que nous payons fort cher se permette ce genre de mise à jour !

    Dr Patrick Gassmann

  • Une usine à gaz de plus....

    Le 05 juillet 2016

  • 1/3 payant automatique

    Le 05 juillet 2016

    Le foutage de g.... continue. Vive notre non réactivité et notre vie de champion à la botte des énarques de la sécurité sociale et autres qui se moquent bien de nous. Je ne suis plus fier d'être médecin libéral en France. Je ne sais pas si j'ai envie de pleurer ou de vomir.
    A bon entendeur...

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