
Paris, le lundi 25 juillet 2016 – La Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) a été la première à confirmer son opposition. Réunie en assemblée générale extraordinaire ce week-end, les représentants départementaux de l’organisation ont « blackboulé » (selon l’expression même du syndicat) la proposition de nouvelle convention présentée jeudi 21 juillet par l’Assurance maladie. Dans un nouvel éditorial, le président de la CSMF, Jean-Paul Ortiz estime que les avancées obtenues la semaine dernière sont insuffisantes et ne permettent en rien de « sauver la médecine libérale en préparant sa mutation technologique et en valorisant le rôle du médecin », objectif présenté comme « l’ambition » du syndicat.
Tractations
Au sein des autres formations, les tractations se poursuivent. Chez MG France, c’est le maintien d’une revalorisation du C en deux temps qui semble constituer le point de blocage ultime. La tonalité est plutôt pessimiste, mais une évolution n’est nullement impossible.
A la Fédération des médecins de France (FMF) et au Syndicat des médecins libéraux (SML) on demeure également très partagé. Des avancées importantes sont saluées, même si le SML regrette que le sort des praticiens de secteur 2 non adhérents au contrat d’accès aux soins (CAS) n’ait guère suscité l’attention. De son côté, le patron de la Fédération des médecins de France (FMF) reconnaît que les sommes engagées sont significatives. Pour ces deux organisations, plus peut-être que le projet de convention en lui-même, c’est la personnalité de Marisol Touraine, nécessairement dans l’ombre de ces négociations qui pose problème. « Je n'ai pas envie d'être sur la photo pour que Marisol Touraine en tire avantage car c'est pour moi la pire ministre [de la santé] qu'il y ait jamais eu mais, en même temps, 1,2 milliard sur la table, c'est une véritable bouffée d'oxygène pour les médecins libéraux », explique ainsi cité dans les Echos Jean-Paul Hamon, patron de la FMF. Du côté du SML on renchérit en évoquant une « allergie des médecins à tout projet émanant de Marisol Touraine », diagnostique Eric Henry. En écho à cette "aversion" suscitée par Marisol Touraine, certains syndicats pourraient être tentés de repousser la signature de la convention, dans l’espoir que la campagne électorale et un éventuel changement de majorité leurs apportent de nouvelles raisons d’espérer. Dans ce paysage, seul le Bloc paraît avoir de sérieuses velléités de signer, ce qui se révélerait cependant insuffisant pour permettre la validation de la convention.
Jusqu’au bout
Ce mercredi 27 juillet, une nouvelle réunion doit permettre (e théorie) de recueillir les accords des syndicats. Mais dans le contexte de tension actuelle, beaucoup estiment qu’elle pourrait être l’occasion de nouvelles avancées, qui pourraient permettre de dénouer certains nœuds. Les organisations s’affirment cependant prêtes à prendre leur temps. Alors que le terme de la négociation a été fixé au 26 août, la CSMF et le SML ont déjà prévu des réunions de leurs assemblées générales le 25 août pour discuter d’éventuels changements.
Peut-être la dernière chance de changer le système
Certains observateurs considèrent que les manifestations d’hostilité participent à la théâtralisation habituelle des discussions conventionnelles, mais n’excluent pas que les signatures soient nombreuses. Sur France Inter, l’éditorialiste Dominique Seux ce matin affirmait ainsi que « Plusieurs syndicats ont fait savoir discrètement à l'Elysée qu'ils pourraient signer si certaines de leurs ultimes revendications étaient prises en compte cette semaine ». Sur Twitter et au sein des coordinations qui au printemps 2015 avaient en région mené la fronde contre le projet de loi de santé, on semble s’inquiéter d’une signature et d’une éventuelle mise en scène de certains syndicats, notamment de la CSMF. Ces praticiens appellent les organisations à rejeter en bloc la convention. C’est également la position de l’Union française pour une médecine libre (UFML). Cette organisation qui n’est pas représentée au sein des Union régionales des professions de santé (URPS) considère que signer serait perdre une des rares occasions de refondre la médecine libérale. « Pour le ministère, l'assurance maladie à ses ordres, les complémentaires à son service intéressé, et la presse (dont une partie appartient aux complémentaires) la hausse de la consultation à 25 euros sera présentée comme une augmentation historique, et Marisol Touraine comme ayant capitulé pour partie devant des syndicats forts tout en obtenant une victoire qui consacrera sa méthode...Pour l'opposition, peut être demain au pouvoir, la signature de l'accord conventionnel sera perçue comme un signal extrêmement négatif, et ceux qui prônaient une révision de la loi de santé et la construction d'un nouveau pacte social et sanitaire, rangeront avec soulagement les dossiers d'un sujet où il n'y a que des coups à prendre. Ainsi les représentants des médecins auront en une signature et une pièce de 2 euros, liquidé tout espoir de rupture avec la technostructure, et livré toute une profession à l'obéissance, à l'état, à son administration et aux assureurs.... Ainsi ils auront ravalé la loi de modernisation au second plan derrière l'intérêt d'une augmentation tarifaire, dont la hauteur sera le marqueur dans les couloirs de l'opposition de l'importance à ne pas mener le combat... Nous avons pourtant une chance rare : celle de la prise de conscience de nombre de politiques, qu'il existe un risque d'effondrement qu'ils n'avaient pas mesuré, ainsi que celle de la main mise du système assurantiel » écrit Jérôme Marty dans un éditorial publié en fin de semaine dernière sur le site de l'UFML.
Aurélie Haroche