
Paris, le mardi 30 août 2016 – Dix ans après sa naissance, l’Observatoire des violences en milieu de santé (ONVS) vient de publier un nouveau rapport, recensant les signalements réalisés par les établissements partenaires en 2014. Depuis son installation, les chiffres présentés par l’Observatoire sont grevés d’un biais de déclaration. C’est ainsi notamment qu’il est impossible d’établir une cartographie des régions les plus exposées à la violence : si l’Ile-de-France arrive en tête avec 4 426 signalements en 2013 et 2014, c’est d’abord parce qu’elle est la plus engagée dans le processus de déclaration. Concernant le nombre de faits rapportés, les premières années avaient été marquées par de fortes hausses successives qui reflétaient en réalité la plus grande connaissance du dispositif par les hôpitaux et les centres de santé. La tendance s’est estompée aujourd’hui et l’on peut considérer comme un fait alarmant l’augmentation de 15 % constatée entre 2013 et 2014, d’autant plus qu’en un an le nombre d’établissements déclarants a baissé de 353 à 337.
Déclaration des violences à géométrie variable
Cette baisse du nombre d’hôpitaux participant au recensement pourrait alerter sur un certain essoufflement du dispositif. La situation varie significativement d’une région à l’autre : quand en Ile de France le nombre d’établissements déclarants continue à progresser (passant de 55 à 61 en un an), l’érosion est marquée en Bretagne (de 21 à 15) et en Provence-Alpes-Côte-d’Azur (38 à 22). Face à cette tendance, l’Observatoire remarque que « d’un établissement à l’autre les politiques en la matière diffèrent. Pour certains, la mise en place d’un outil interne et de recensement des déclarations et d’initiatives en matière de prévention des violences va de pair avec l’alimentation de la plate-forme nationale, pour d’autres les actions se concentrent au niveau local ». Le rapport souligne encore que « Certains abandonnent le partenariat au bout de quelques mois, quelques années, au gré des mutations du ou des personnels en charge des déclarations ; la mission n’est pas reprise ». Ces observations mettent en évidence les failles d’un système reposant sur le volontariat total et qui empêche de disposer de chiffres plus précis. On retrouve les mêmes faiblesses en ce qui concerne le type des établissements représenté : le public compose la très large majorité des établissements déclarants (94 %).
Une violence plus marquée ? Pas si sûr !
Plus faciles à commenter pourraient être les chiffres concernant les types de faits. Cependant, en la matière également, des biais de déclaration restreignent la possibilité d’établir un panorama satisfaisant de la violence en établissement de santé et de son évolution. Ainsi, l’Observatoire suggère une augmentation de la gravité des atteintes aux personnes entre 2013 et 2014. Les actes de niveau 4 (« violences avec arme pouvant aller jusqu’au crime ») concernent désormais 2 % des faits signalés contre 1 % en 2013, tandis que le niveau 3 (violences physiques) représentaient en 2014 48 % des signalements contre 45 % trois ans plus tôt. Cependant, là encore, il ne faut pas y lire nécessairement une détérioration du climat mais la conséquence d’une analyse plus pointue. L’Observatoire indique que des « corrections » ont été « apportées » grâce à un « agent dorénavant dédié à la gestion de la plateforme ONVS. Il lit, analyse, alerte et effectue les retours nécessaires aux établissements pour toutes les déclarations, et ce de manière exhaustive ». Grâce à ce travail, des classifications différentes ont été obtenues : une partie des violences aujourd’hui considérées comme volontaires et atteignant les niveaux 3 ou 4 était ainsi hier jugée comme involontaires.
Infirmières toujours en première ligne
Face à ces différents écueils, les seules données qui permettent une meilleure connaissance de la violence en milieu de santé demeurent inchangées d’année en année. On rappellera ainsi que les services les plus exposés à la violence sont ceux de psychiatrie (avec un cinquième des incidents déclarés), les urgences, la médecine (qui rappelle l’Observatoire « recouvre une grande diversité d’unité entre chaque établissement ») et la gériatrie. Enfin, les victimes sont majoritairement des membres des personnels (85 %) et les auteurs des patients, des visiteurs ou des accompagnants (90 %).
La prise en charge du patient est invoquée dans 59 % des cas et l’attente trop longue dans 12 % des situations. Dans cette confrontation difficile avec le public, qui se serait aggravée selon d’autres données publiées par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), les infirmières sont en première ligne. Elles sont la cible des violences dans 46 % des cas.
Le rapport de l’Observatoire des violences en milieu de santé
Aurélie Haroche