
Londres, le samedi 10 septembre 2016 – La révélation que l’apprentissage du toucher vaginal pouvait être réalisé à l’insu des patientes (lorsque celles-ci sont endormies) a soulevé l’année dernière en France controverses et polémiques. Au-delà des discussions autour de la question du consentement, beaucoup ont souligné comment ce phénomène mettait en avant la complexité de l’apprentissage de certains gestes médicaux. Depuis plusieurs années, des réponses ont été apportées grâce au développement d’appareils de simulation de plus en plus performants, permettant d’appliquer le fameux « jamais la première fois avec un patient ». Cependant, la simulation se montre encore imparfaite dans de nombreux domaines. Notamment en ce qui concerne la reproduction d’un vagin.
« Voir » ce que l’on « touche »
Une équipe de l’Imperial College de Londres a pu redécouvrir combien l’anatomie féminine est complexe. Tout a commencé par la volonté de Fernando Bello, professeur en robotique et simulation médicale et chirurgicale de mettre au point un rectum virtuel. L’examen rectal étant l’un des plus délicats à réaliser, une telle innovation paraissait attendue. Ce projet, bien qu’ayant révélé plus de difficultés qu’envisagées, a inspiré un autre défi, plus difficile encore : celui de réaliser un vagin virtuel. La première étape a d’abord consisté en une analyse précise des gestes réalisés par des gynécologues lors d’un toucher vaginal, à l’aide de différents capteurs. L’anatomie de femmes en bonne santé a également été modélisée minutieusement. Un vagin virtuel en silicone a ensuite été conçu, connecté à un programme, qui grâce à un système haptique, permet à l’étudiant de connaître les mêmes sensations que lors d’un examen réel, avec notamment une réponse en fonction de la pression des doigts. Les chercheurs notent d’ailleurs que le système a été bien plus difficile à réaliser que pour le toucher rectal, puisqu’ici deux doigts et non plus un seul sont impliqués, auxquels s’ajoute le travail réalisé par l’autre main à sur l'abdomen. Le dispositif est complété d’un « retour sur écran » où l’utilisateur peut voir ce qu’il examine en trois dimensions, permettant de confronter la « réalité » avec ses impressions. « Trop souvent, pour ne pas perdre la face devant leurs camarades, les étudiants affirment avoir réussi à palper l’organe recherché, sans y être parvenus. Ici, les choses sont différentes », expliquent les promoteurs du système.
Coût
Cinq ans de travail ont été nécessaires pour aboutir à un système qui semble répondre aux attentes, sans atteindre encore la perfection, signe de la complexité du défi. Le programme soulève en tout état de cause un grand enthousiasme. Pour le docteur Sandra Ann Carson, membre de l’Association américaine des gynécologues obstétriciens ce vagin robotique pourrait représenter un « fabuleux » atout pour la formation médicale, à condition que son coût ne soit pas trop élevé. Un autre défi à relever pour l’équipe de Fernando Bello.
Aurélie Haroche