
Paris, le lundi 11 mars 2019 – C’est désormais un passage
obligé. Avant toute interview à un média national, Agnès Buzyn doit
répondre aux rumeurs insistantes qui depuis plusieurs semaines la
voient prendre la tête de la liste LREM aux élections européennes.
Tout en prenant soin de répéter son profond intérêt pour la cause
européenne, le ministre préfère le plus souvent aborder les
questions sur sa candidature en se concentrant sur la forme, plutôt
que sur le fond. « Je trouve que tous ces articles et toutes ces
personnes qui s'expriment dans les journaux s'avancent beaucoup et
ne connaissent pas forcément ce que je pense. Je rappellerais que
je suis médecin, que je connais bien le secret médical et que je
n'ai pas l'habitude de raconter mes conversations avec le président
de la République » a-t-elle ainsi fait savoir aux journalistes
de France Info ce vendredi qui évoquaient une « révélation »
faite par Les Echos selon laquelle le ministre aurait
indiqué à Emmanuel Macron ne pas vouloir s’engager dans la campagne
européenne.
Endométriose : amélioration tous azimuts
Après avoir évacué ces interrogations itératives, le ministre
a pu se consacrer à sa mission : la santé. Et ce 8 mars, il a été
principalement question de celle des femmes. Agnès Buzyn a
notamment dévoilé à France Info, puis à l’occasion d’une visite à
l’hôpital Saint Joseph à Paris, les mesures adoptées par les
pouvoirs publics pour améliorer le dépistage et la prise en charge
de l’endométriose. C’est une pathologie souvent méconnue des
médecins et qui souffre d’un important retard de diagnostic a
déploré le ministre qui souhaite faire évoluer significativement la
situation. Concernant le repérage, l’accent va être mis sur la
sensibilisation des professionnels de santé au cours de leurs
études et de leur formation. Par ailleurs, la recherche des signes
d’endométriose sera intégrée parmi les objectifs des nouvelles
consultations obligatoires dédiées aux pré-adolescentes et
adolescentes (à 11-13 ans et à 15-16 ans), tandis qu’elle devra
également être réalisée lors des consultations concernant la santé
sexuelle des jeunes femmes. En matière de prise en charge, le
ministère de la Santé souhaite la mise en place de "filières"
régionales. Pour ce faire, un groupe de travail doit être
prochainement installé afin de définir les missions et objectifs de
ces réseaux (qui pourraient s’inspirer du dispositif déjà mis en
place à l’hôpital Saint Joseph), avant leur déploiement en région.
Il est déjà certain que « la prise en charge de la douleur et
des troubles de la fertilité devront faire l’objet d’une vigilance
particulière dans ces parcours ». Enfin, pour accroître la
sensibilisation de tous, des campagnes ciblées vers les
professionnels de santé et vers le grand public sont
prévues.
Loi de bioéthique : des arbitrages encore en cours
Aucune loi n’aurait permis une euthanasie légale du fils d’Anne Ratier selon Agnès Buzyn
On le sait, cette révision des lois de bioéthique ne prévoit
pas de nouvelles discussions sur l’accompagnement des personnes en
fin de vie. Pourtant, les réflexions sur ce sujet demeurent l’objet
de débats passionnels. Ainsi, ces derniers jours, le témoignage de
la mère d’un enfant lourdement handicapé (en raison d'une hypoxie
néonatale) qui a révélé avoir donné la mort à son fils (trente ans
auparavant), suscite beaucoup d’émotions et de commentaires. C’est
principalement la rhétorique développée par Anne Ratier qui
présente l’euthanasie médicamenteuse qu’elle a choisie de mettre en
œuvre comme un « geste d’amour » qui interroge. Alors que de
nombreuses réactions ont regretté une telle présentation, notamment
sur les réseaux sociaux, Agnès Buyzn a pour sa part analysé : «
C’est une situation atrocement douloureuse. Rien ne justifie
qu'on puisse donner la mort à un enfant », avant d’ajouter : «
Je comprends que la vie de cette femme fait qu'elle n'était pas
suffisamment accompagnée. Aujourd'hui, l'accompagnement des
familles s'améliore, il est encore insuffisant. Il est nécessaire
de soulager ces familles » a-t-elle poursuivi. Si Anne Ratier a
regretté qu’Agnès Buzyn ait eu l’air d’éluder l’enjeu central de
son témoignage qui concerne l’euthanasie, le ministre de la Santé a
pourtant été assez explicite sur ce point. « La loi Leonetti qui
est une loi sur la fin de vie permet d'accompagner les personnes à
l'agonie si elles ont exprimé leur désir d'être accompagnées. Ce
n'est pas une loi qui s'applique à cet enfant parce qu'il n'était
pas agonisant, il était tout simplement lourdement handicapé.
Aujourd'hui, il n'y a pas de loi, en Belgique ou en France, qui
aurait permis d'accompagner autrement cet enfant », a-t-elle
ainsi expliqué.
Complaisance médiatique
Aurélie Haroche