
Paris, le lundi 23 mars 2020 - L’organisation des soins non
liés à la prise en charge des patients infectés par SARS-CoV-2 est
l’objet d’une vigilance soutenue. Si un grand nombre de praticiens
(spécialistes et dentistes notamment) ont été invités ou ont choisi
de reporter les soins non urgents (d’une part pour éviter les
déplacements et contacts pouvant favoriser la diffusion du virus et
d’autre part faute de matériels de protection suffisants), le suivi
de nombreuses pathologies chroniques et de différentes situations
(grossesse, sevrage des opiacés…) exige une continuité des soins.
Pour assurer cette dernière, les sociétés savantes, les
organisations de praticiens et les associations de patients se sont
mobilisés pour diffuser des recommandations adaptées. La
téléconsultation, les instruments d’auto-mesure (connectés ou non)
et l’autorisation donnée aux pharmaciens d’honorer des ordonnances
au-delà de leur délai d’expiration permettent en partie de répondre
aux besoins de nombreux patients en limitant les rendez-vous
physiques.
Manque de masques en dialyse
Cependant, pour certaines pathologies ou situations, la prise
en charge à distance est exclue et des inquiétudes s’expriment, qui
concernent notamment la pénurie de matériels de protection. Ainsi,
ce 22 mars, l’association de patients insuffisants rénaux, Renaloo,
a alerté le ministère de la Santé, la Direction générale de la
santé et différentes instances, de l’absence de masques
chirurgicaux délivrés aux patients en dialyse durant leurs séances.
La préoccupation concerne les patients hémodialysés dans les
établissements de santé de niveau trois (centres hospitaliers
généraux non CHR, établissements privés lucratifs et centres
associatifs) qui assurent la prise en charge de deux tiers des
malades en France (3 500 personnes). Dans ces installations, 80 à
90 % des patients seraient privés de masques chirurgicaux selon
l’association. Pourtant, cette protection est essentielle pour ces
patients à très haut risque de complications et alors que les
conditions de prise en charge accroissent le risque de
contamination. Non seulement les patients doivent effectuer des
déplacements pour se rendre à leurs séances, mais aussi ces
dernières « se déroulent très majoritairement dans des salles
communes, impliquant une promiscuité importante ».
L’association indique recevoir de nombreux témoignages de patients
inquiets, d’autant plus que compte tenu de leur âge et de leurs
comorbidités, certains redoutent de ne pas être éligibles
prioritairement à la réanimation en cas de complications.
Aussi, l’association demande-t-elle un approvisionnement immédiat
en masques de l’ensemble des centres de dialyse permettant de
répondre aux besoins de tous les malades. Sa préoccupation concerne
également les personnels soignants. « Le rationnement important
des masques FFP2 implique que les personnels de dialyse n’ont pas
la possibilité de porter ces masques durant les soins courants de
dialyse des patients infectés par le COVID-19, qui sont de plus en
plus nombreux. Infirmières, aides-soignants et néphrologues sont
donc eux aussi très exposés. Cette situation fait courir le risque
imminent de pénurie de personnels soignants de dialyse, qui aurait
des conséquences dramatiques pour les patients, puisqu’elle
pourrait conduire à un rationnement de l’accès à la dialyse »
ajoute encore l’association.
Sevrage aux opiacés : un arrêté pour éviter les ruptures
La situation particulière des patients suivant un traitement
substitutif aux opiacés (TSO) a également suscité la semaine
dernière la préoccupation des spécialistes. En effet, le texte
réglementaire permettant le prolongement de la délivrance des
traitements chroniques ne concernait pas les TSO. La Fédération
Addiction s’est mobilisée pour signaler à la Direction générale de
la Santé (DGS) la nécessité de prévoir un dispositif permettant
d’assurer la continuité des prises en charge de ces sujets, afin
d’éviter des ruptures de soins très dommageables. Il existe en
effet, compte tenu de la désorganisation de nombreux services, un
risque réel que « les médicaments ne puissent pas être
fournis » relève la Fédération. Cette alerte a été entendue et
un arrêté a été publié le 19 mars permettent aux pharmaciens
d’officine de renouveler la délivrance des médicaments contenant
des substances à propriétés hypnotiques ou anxiolytiques.
Cependant, afin de limiter le mésusage, la délivrance ne peut être
assurée pour une période supérieure à 28 jours précise le
texte.
Aurélie Haroche