Paris, le lundi 30 mars 2020 – L’imprécision des chiffres
établissant le nombre de personnes infectées par SARS-CoV-2 est une
donnée acquise depuis le début de l’épidémie, les limites du
dépistage étant bien connues. A contrario, beaucoup voulaient voir
dans le nombre de décès, également quotidiennement affiché, une
information plus tangible, offrant un outil pour l’évaluation de
l’épidémie et la comparaison des situations entre les pays. En
réalité, le chiffre énoncé tous les soirs par le directeur général
de la Santé (DGS) ne permet qu’une appréciation fragmentaire de la
réalité.
Un dispositif pour connaître la situation dans les EPHAD
Jérôme Salomon a en effet signalé la semaine dernière que les
éléments qu’il communique ne concernent que les décès enregistrés à
l’hôpital, comptabilisés grâce au dispositif SI-VIC (Système
d’information pour le suivi des victimes d’attentats et de
situations sanitaires exceptionnelles), dont l’exploitation est
réalisée chaque jour par Santé publique France (SPF). Ainsi, ne
dispose-t-on pas de données concernant les Etablissements
hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) et les décès en
ville. Concernant les premiers, un système a été mis en place la
semaine dernière qui devrait permettre de disposer d’éléments
chiffrés dans les prochains jours. Cependant, les informations
recueillies par les Agences régionales de Santé (ARS) ne permettent
pas une appréciation parfaite de la mortalité liée au Covid-19 dans
les EHPAD, en raison de la rareté des dépistages dans ces
structures.
Surmortalité dans certains départements
Par ailleurs, les pouvoirs publics devraient de plus en plus
s’appuyer sur les données de l’Institut national des statistiques
(INSEE), permettant de mesurer l’évolution de la mortalité par
rapport aux années précédentes. L’INSEE vient ainsi d’établir un
premier bilan, pour la France entière et département par
département, qu’il devrait enrichir toutes les semaines. On
constate tout d’abord que « le nombre de décès totaux
enregistrés à la date du 26 mars 2020 et survenus entre le
1eret le 16 mars, est ainsi
toujours inférieur aux décès survenus entre le
1er et le 16 mars, en 2018 ou 2019 (26 900
décès en 2020 contre respectivement 28 600 et 32 900 en 2019 et
2018 sur les périodes équivalentes) » détaille l’INSEE. Cette
situation s’explique notamment par une épidémie de grippe
particulièrement peu meurtrière en ce début d’année,
comparativement à l’année 2018. Cependant, dans certains
départements, des excès de mortalité sont observés dès la première
quinzaine de mars. « Ainsi, entre le
1ermars et le 16 mars 2020, le
nombre de décès enregistrés dans le Haut-Rhin est de 38 % supérieur
à ceux enregistrés sur la même période en 2019 ; l’augmentation est
notamment de 31 % en Corse du Sud, 16 % dans les Vosges et 14 %
dans l’Oise ».
Cause du décès
Il convient pour une lecture raisonnée de ces chiffres de
rappeler leur absence d’exhaustivité parfaite. Certaines communes
(12 %) continuent en effet à transmettre leurs actes d’état civil
par bulletins papiers ce qui freine le traitement des données la
poste ne fonctionnant pas normalement aujourd’hui. Par ailleurs, la
comparaison entre les années devra tenir compte pour les semaines à
venir des effets potentiellement positifs sur la mortalité du
confinement (diminution de la mortalité sur la route par exemple).
Enfin, et surtout, les surmortalités constatées ne peuvent pas être
automatiquement attribuées au Covid-19. « Il ne s’agit toutefois
pas d’une estimation de la surmortalité liée au Covid-19 qui
nécessite la mobilisation de modélisations économétriques mises en
œuvre par Santé Publique France » rappelle l’INSEE. Pour
réaliser de telles modélisations, SPF s’appuie sur les certificats
de décès établissant leur cause. Or aujourd’hui, la certification
électronique des décès, outil mis en place au lendemain de la
canicule, est loin d’être généralisée. « Dans le meilleur des
mondes, il y aurait 100 % de certifications électroniques, ce
serait la seule source utilisée et il n’y aurait pas de problème.
Mais on est aujourd’hui à 18 % de décès déclarés par la
certification électronique, donc ce n’est pas utilisable seul, SpF
ne peut s’en servir qu’en complément d’autres données. Il faudrait
déployer amplement la certification électronique. Une crise
sanitaire comme celle que nous vivons peut permettre à tout le
monde, et notamment aux médecins, de comprendre l’intérêt d’adopter
ce système » analyse Grégoire Rey, directeur du Centre
d’épidémiologie sur les causes médicales de décès (CépiDc) de
l’Inserm cité par Le Monde.
Un chiffre incertain et peut-être pas si utile pour
l’appréciation quotidienne de l’épidémie
Si on le voit, l’évaluation de la mortalité liée à l’épidémie
est loin d’être un exercice aisé, cet outil n’est par ailleurs
probablement pas le plus adapté pour apprécier l’évolution de
l’épidémie. Le Professeur Salomon a ainsi souligné hier qu’il était
bien plus pertinent de se concentrer sur le nombre de nouvelles
personnes admises en réanimation. « Il y a une augmentation de
10 % de malades entrants depuis hier, reflet de contaminations
survenues avant les mesures de confinement.
Trois-cent-cinquante-neuf patients graves sont entrés en
réanimation aujourd’hui. C’est l’élément le plus important à
surveiller car il reflète la dynamique de l’épidémie. Si les
mesures de confinement et gestes barrières ont été respectées, nous
devrions observer une réduction du nombre de personnes entrant en
réanimation d’ici à la fin de semaine », a ainsi signalé le
Directeur général de la Santé.
C’est l’observation de ces chiffres qui permet notamment d’espérer
aujourd’hui l’atteinte du pic épidémique en Italie, qui bien que
connaissant un nombre de décès toujours très élevé, voit le nombre
de nouvelles admissions en réanimation lentement diminuer.
Dans les chiffres que vous fournissez quotidiennement, les hospitalisations en réa sont-elles toutes dues au Covid19 ? Quid des hospitalisation en réa pour tous les autres problèmes de santé ? Quid des hospit en hôpital privé comme public pour tous les autres problèmes de santé (IDM, AVC, TS.....)
Françoise IDE
Deux questions sur la mortalité sur le Diamond Princess
Le 01 avril 2020
La relativement faible mortalité enregistrée sur le Diamond Princess pourrait être réévaluée en fonction d’au moins 2 facteurs :
1/ Savez-vous s’ils ont-ils été réanimés sur le bateau, ou si leur aggravation a conduit à des transferts ?
2/ Si les prélèvements ont été strictement limités à des cas symptomatiques, le taux méconnu d’infectés asymptomatiques diminue encore plus la mortalité de ce groupe relativement âgé, mais avec un état général conservé.