
Certes, depuis le début de l’épidémie, un article dans le
Lancet n’est plus parole d’évangile…
Une transparence bienvenue
Après que les résultats de la phase 1 se sont révélés en
faveur de deux doses, les protocoles ont été modifiés pour
administrer deux doses standard (cohorte SD/SD) d'environ 5 ×
1010 particules virales par dose à 28 jours
d'intervalle. À noter qu’un sous-ensemble (cohorte LD/SD) de l'un
des essais britanniques avait reçu - par inadvertance - une
demi-dose du vaccin comme première dose avant un changement de
méthode de quantification du dosage. En outre, les modifications du
protocole ont permis à d'autres participants à l'essai initialement
prévus pour recevoir une seule dose, de recevoir un rappel plus de
28 jours après leur première dose.
L'analyse de l'efficacité primaire reposait sur la survenue ou non de Covid-19 symptomatiques chez des participants séronégatifs, confirmées alors par un écouvillon positif au test RT-PCR plus de 14 jours après la deuxième dose de vaccin. La date limite de collecte des données a été fixée au 4 novembre 2020. L'efficacité du vaccin a été calculée grâce au risque relatif dérivé d'un modèle de régression de Poisson robuste ajusté en fonction de l'âge.
70 % d’efficacité globale et 90 % chez ceux ayant reçu une demi-dose initiale par inadvertance
Entre le 23 avril et le 4 novembre 2020, 23 848 participants
ont été enrôlés dont 11 636 (7 548 au Royaume-Uni, 4 088 au Brésil)
ont été inclus dans l'analyse primaire d'efficacité intermédiaire.
Chez ceux ayant reçu deux doses standard, l'efficacité du vaccin a
été de 62,1 % (intervalle de confiance à 95 % IC 95 % = 41,0-75,7 ;
27 [0,6 %] de 4 440 dans le groupe ChAdOx1 nCoV-19 versus 71
[1,6 %] de 4 455 dans le groupe témoin) . Chez ceux ayant reçu une
faible dose suivie d'une dose standard, l'efficacité a été de 90 %
(67,4-97,0 ; 3 cas [0-2 %] sur 1 367 versus 30 [2-2 %] sur 1
374 ; p interaction = 0,010).
Autant d’effets indésirables parmi les personnes vaccinées et celles sous placebo
Le suivi de sécurité a porté sur 74 341 mois-personnes (médiane 3-4 mois, IQR 1,3-4,8) : 175 événements indésirables graves sont survenus chez 168 participants, 84 dans le groupe ChAdOx1 nCoV-19 et 91 dans le groupe témoin. Trois événements ont été classés comme pouvant être liés à un vaccin : un dans le groupe ChAdOx1 nCoV-19, un dans le groupe de contrôle et un chez un participant qui reste masqué à l'attribution du groupe.Il avait été précédemment fait état de la réactogénicité locale et systémique du ChAdOx1 nCoV-19 et montré qu'il est bien toléré et que les effets secondaires sont moins importants et moins nombreux chez les personnes âgées, à des doses plus faibles et après la deuxième dose. Bien que de nombreux événements indésirables graves aient été signalés dans l'étude compte tenu de la taille et de l'état de santé de la population incluse, aucune alerte grave n’a été rapportée. Néanmoins, 3 myélites transverses ont été initialement signalées comme des effets indésirables graves présumés, dont deux dans le groupe d'étude du vaccin ChAdOx1 nCoV-19, ce qui a déclenché une pause dans l'étude pour un examen minutieux de chaque cas. Un examen clinique indépendant a indiqué qu'un cas dans le groupe expérimental et un cas dans le groupe de contrôle ne sont probablement pas liés aux interventions de l'étude, mais une relation reste possible dans le troisième cas. Une surveillance attentive de la sécurité, y compris des événements neurologiques, se poursuit dans les essais.
Les auteurs concluent que le ChAdOx1 nCoV-19 a un profil de sécurité acceptable et s'est révélé efficace contre la Covid-19 symptomatique dans cette analyse intermédiaire des essais cliniques en cours.
Quelques limitations
Ces essais ont utilisé une définition restreinte de la maladie symptomatique, en raison du manque de spécificité d’autres symptômes associés à la Covid-19, ce qui rendra difficile la comparaison avec d’autres essais vaccinaux alignés sur d’autres symptômes. Toutefois, ont été inclus des paramètres plus facilement comparables entres diverses études, comme les admissions à l'hôpital et les formes graves. C’est ainsi que ce vaccin montre une protection complète contre l'hospitalisation dans les dix cas disponibles pour l'analyse plus de 21 jours après la première dose.Les caractéristiques démographiques des personnes enrôlées varient selon les pays. Au Royaume-Uni, la population était majoritairement blanche et, dans les groupes d'âge plus jeunes, comprenait davantage de femmes en raison de l'accent mis sur l'enrôlement des personnels soignants. Il s'agit donc d'une population à moindre risque de formes graves. Le profil démographique, combiné à l'auto-examen hebdomadaire des infections asymptomatiques au Royaume-Uni, donne un profil de gravité des cas plus faible. Au Brésil, la proportion d'ethnies non blanches est plus importante et, là encore, la majorité des personnes inscrites étaient des professionnels de la santé.
Les données d'immunogénicité montrent des réponses immunitaires similaires après la vaccination avec deux doses, chez les adultes plus âgés, y compris ceux de plus de 70 ans, par rapport à ceux de moins de 55 ans. Toutefois, comme les groupes plus âgés ont été recrutés plus tard que les groupes plus jeunes, les données d'efficacité dans ces cohortes sont actuellement limitées par le petit nombre de cas.
Dans cette analyse intermédiaire, la durée de la protection n’a pu être évaluée, puisque les premiers essais ont été lancés en avril 2020, de sorte que tous les épisodes de maladie sont survenus au cours des 6 mois suivant l'administration de la première dose. Il reste donc dans les analyses futures incluant des données supplémentaires au fur et à mesure, à étudier les différences dans des sous-groupes clés tels que les cohortes plus âgées, l'ethnicité, le schéma posologique et le calendrier des vaccinations de rappel, ainsi que les corrélats de protection.
Dr Bernard-Alex Gaüzère