Euthanasie : l’Espagne dit oui, le Portugal dit non

Madrid, le vendredi 19 mars – Le Parlement espagnol a définitivement adopté la loi autorisant l’euthanasie. Un vote qui intervient quelques jours après que le Tribunal Constitutionnel portugais ait censuré une loi similaire.

L’annonce a provoqué plus de quatre minutes d’applaudissements. Ce jeudi, par 202 voix pour et 141 voix contre, le Congrès des députés, la chambre basse du Parlement espagnol, a voté définitivement la loi autorisant l’euthanasie et le suicide assisté. Sans grande surprise, les députés de gauche et du centre ont voté en faveur du texte, tandis que les parlementaires de droite et d’extrême-droite s’y sont opposés. La loi entrera en vigueur en juin, faisant de l’Espagne le sixième pays du monde à autoriser l’euthanasie active.

Une clause de conscience pour les médecins espagnols

Dans le détail, tout citoyen ou résident espagnol qui souffre d’une « maladie grave ou incurable » ou de « douleurs chroniques le plaçant dans une situation d’incapacité » pourra demander à être euthanasié ou à bénéficier d’une assistance médicale au suicide. La majorité socialiste, qui a porté le texte, a insisté sur les nombreux garde-fous mis en place. Ainsi, contrairement à ce qu’il en est en Belgique et aux Pays-Bas, l’euthanasie est réservée aux personnes majeures. Le patient devra formuler sa demander d’euthanasie à quatre reprises et recevoir l’avis favorable de plusieurs médecins et d’une commission d’évaluation : le processus prendra un mois minimum. Face aux réticences de nombreux soignants, les médecins bénéficieront d’une clause de conscience.

L’adoption de ce texte met fin, de façon sans doute définitive, à un débat qui divise l’Espagne depuis des décennies. Les problèmes liés à la fin de vie ont été mis en lumière pour la première fois par la mort de Ramon Sampedro par suicide assisté en 1998, une histoire adaptée au cinéma en 2004 dans le film Mar Adentro. Selon les sondages, 85 % des Espagnols sont favorables à la légalisation de l’euthanasie.

Le Président du conseil Pedro Sanchez, qui avait fait de cette loi une de ses promesses de campagne, a déclaré à l’annonce du vote du Congrès que l’Espagne était devenue « un pays plus humain, plus juste et plus libre ». A l’inverse, l’annonce de l’adoption du texte a provoqué la colère des milieux conservateurs. La conférence épiscopale espagnole a qualifié l’adoption de la loi de « mauvaise nouvelle » et a appelé à défendre « la culture de la vie ».

La loi sur l’euthanasie jugée inconstitutionnel au Portugal

Le Portugal voisin aurait dû prendre le même chemin que l’Espagne, le Parlement local ayant adopté une loi légalisant l’euthanasie le 29 janvier dernier. Mais la loi a été censurée par le Tribunal constitutionnel ce lundi, par sept voix contre cinq. Le Tribunal avait été saisi par le Président de la République Marcelo de Sousa, fervent catholique et opposé à la légalisation de l’euthanasie.

Les juges portugais ont retoqué le texte au motif qu’il n’était pas suffisamment précis. La notion de « lésions définitives d’extrême gravité » notamment, censé justifier le recours à une euthanasie, a été jugé peu claire. En revanche, le Tribunal constitutionnel ne rejette pas le principe même de l’euthanasie, alors même que la Constitution portugaise proclame « l’inviolabilité de la vie humaine ». Selon le président du Tribunal, « le droit à la vie ne peut pas se transformer en un devoir de vivre dans n’importe quel circonstance ». Le texte a donc été renvoyé au Parlement pour être remanié et remplir ainsi les exigences de clartés fixées par le juge constitutionnel.

Nicolas Barbet

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