
Pass sanitaire dans les établissements médico-sociaux : le Conseil scientifique invite à la souplesse
La situation dramatique des Antilles s’explique notamment par une couverture vaccinale très restreinte avec moins de 20 % de la population complètement vaccinée, alors que les facteurs de risque (diabète, surpoids) sont plus fréquents dans les départements d’outre-mer. Pour faire progresser le taux de vaccination, non pas seulement aux Antilles, mais également partout en France, le gouvernement, mise, on le sait, sur le pass sanitaire, dont l’élargissement de l’application connaît une étape majeure aujourd’hui. Déjà exigée dans les lieux de culture et de loisirs accueillant plus de 50 personnes, la présentation d’un pass sanitaire s’impose désormais dans les cafés, bars et restaurants, tandis que la jauge de 50 personnes est levée ce qui signifie que tous les établissements doivent effectuer des contrôles, quel que soit le niveau de fréquentation de leur structure. Par ailleurs, en vertu du décret publié hier au Journal officiel, les grands centres commerciaux ne sont pas concernés, sauf décision préfectorale en fonction des indicateurs épidémiques départementaux. En outre, les voyages en avion, trains internationaux, TGV, trains Intercités et autocars longue distance sont également soumis au pass sanitaire. Enfin, dans les établissements médico-sociaux, en dehors des urgences, visiteurs et patients devront également satisfaire cette obligation, ce qui nous l’avons déjà évoqué est déploré par un très grand nombre de représentants du monde médical, l’Ordre des médecins en tête. A ce sujet, le Conseil scientifique, qui a émis un avis sur le décret d’application dédié au pass sanitaire publié hier a insisté : « L’application du « pass sanitaire » pour les patients amenés à être hospitalisés doit faire l’objet d’une grande souplesse. Il faut trouver un équilibre entre la sécurité à assurer pour les autres patients et le respect fondamental de la prise en charge individuelle de chaque patient ».Quand les contraintes logistiques conduisent à des décisions contestables
Certificats de contre-indication pour les personnes ne pouvant temporairement être vaccinées ?
Les réserves s’expriment également en ce qui concerne la possibilité de se prévaloir du résultat d’un autotest négatif, même si le décret précise que le prélèvement devra être fait sous le contrôle d’un professionnel. Si cette condition est destinée à limiter les risques de faux négatif (tout en permettant une nouvelle fois d’alléger la pression sur les pharmacies et centres de dépistages), le Conseil scientifique observe néanmoins : « la sensibilité des autotests est inférieure à celle des tests PCR et antigéniques. Mais leur utilisation répétée chez une même personne (ce qui pourrait être le cas chez les jeunes), atténue cette diminution de sensibilité. Il est important de noter que toute personne testée positive avec un autotest doit avoir un test de confirmation PCR et entrer ainsi dans le système de déclarations des cas positifs ». Le Conseil scientifique relève encore que l’élargissement de la durée de validité du test jusqu’à 72 heures et le recours aux autotests : « reposent sur des connaissances scientifiques limitées » tout en comprenant que ces mesures « ont pour objet de répondre aux difficultés logistiques anticipées pour le déploiement des tests à large échelle afin de rendre opérationnel le pass sanitaire ». On notera encore que le Conseil scientifique a émis un avis favorable à la disposition précisée dans le décret voulant qu’après « un épisode infectieux à covid-19 et un isolement, la période à l’issue de cet isolement durant laquelle une nouvelle mesure d’isolement n’est pas justifiée est fixée à 2 mois ». Enfin, il signale que « Les rares personnes ayant une incapacité à court terme de se faire vacciner (1ère ou 2ème dose) pour raison médicale dument confirmée, doivent pouvoir bénéficier d’un certificat de contre-indication temporaire afin de ne pas être pénalisées pour le « pass sanitaire » ».Levée de l’obligation du port du masque : une possibilité encore théorique
Le Conseil scientifique est par contre coi en ce qui concerne la levée de l’obligation du port du masque dans les lieux où le pass sanitaire est exigé. Pourtant, cette mesure suscite une controverse médicale certaine, puisqu’il est établi que la vaccination n’offre qu’une protection partielle quant au risque d’être infecté et de transmettre SARS-CoV-2. Mais si le Conseil scientifique n’a guère été disert sur ce point, c’est peut-être en partie en raison des multiples exceptions déjà annoncées qui devraient fortement limiter les situations dans lesquelles le masque ne sera plus imposé. Ainsi, notamment dans les transports, dans un contexte de circulation importante du variant Delta, le masque demeure la règle pour tous.Pas de tolérance pour les fraudeurs
Les responsables des établissements dont l’accès est conditionné
par la présentation d’un pass sanitaire qui omettraient au cours
d’une période de 45 jours de réaliser à au moins trois reprises les
contrôles nécessaires s’exposent à une amende de 9 000 euros et un
an d’emprisonnement. Si les membres du gouvernement ont voulu
afficher leur fermeté, en annonçant une multiplication des
contrôles, une semaine de tolérance a cependant été promise, en
particulier dans les bars et restaurants. Il n’y aura cependant
aucune indulgence pour les personnes recourant au pass d’un proche,
passibles d’une amende de 135 euros pouvant être rapidement majorée
jusqu’à 750 euros, tandis qu’elle sera portée à 1500 euros en cas
de récidive. Par ailleurs, dans un contexte de progression des faux
certificats, constatée par l’Assurance maladie, il est rappelé que
les professionnels de santé émettant de fausses attestations de
vaccination s’exposent à une radiation, à trois ans
d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Ces mêmes sanctions
pénales s’appliquent également aux utilisateurs de ces faux
pass.
Des restaurateurs inquiets
Cette étape d’extension du pass sanitaire s’inscrit dans un contexte de fébrilité. Beaucoup de représentants des restaurateurs ont notamment évoqué leur appréhension, redoutant des violences liées aux procédures de contrôle, ainsi qu’une baisse de fréquentation de leurs établissements déjà si éprouvés par la crise. D’ailleurs, dans la capitale, peut-être en prévision des difficultés liées à l’application du pass sanitaire, un nombre plus important de restaurants sont fermés qu’à l’accoutumée au mois d’août. Mais cet atermoiement ne leur permettra pas d’éviter l’autre étape redoutée : l’application à partir du 30 août du pass sanitaire aux personnes travaillant dans les établissements concernés par le dispositif. Sur ce point, Elisabeth Borne a confirmé hier que les personnes dont le contrat serait suspendu faute de pass sanitaire, ne pourront toucher d’allocations chômages.A.H.