
Dans un communiqué publié ce jeudi, l’Alliance de la biologie
médicale (ABM), qui regroupe les principaux groupes privés du
secteur (Biogroupe, Cerballiance, Eurofins…) et les syndicats ont
appelé les biologistes privés à se mettre de nouveau en grève à
compter du 1er décembre prochain. Il s’agira du troisième mouvement
social mené par les biologistes médicaux, après l’arrêt de la
remontée des résultats des tests Covid-19 au système SI-DEP fin
octobre et la grève menée entre le 14 et le 16 novembre dernier.
L’objectif est toujours le même : protester contre la volonté du
gouvernement d’opérer un coup de rabot budgétaire sans précédent
sur la biologie médicale.
Le gouvernement a en effet inséré dans le projet de loi de
financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2023, actuellement
débattu au Parlement, un article 23 qui prévoit de réaliser 250
millions d’euros d’économie sur la biologie médicale en diminuant
la cotation des actes courants (hors tests Covid-19). Mais selon
les syndicats de biologistes, ce sont en réalité 280 millions
d’euros d’économie dès 2023 que le gouvernement souhaite réaliser
et 1,2 milliards d’euros d’ici 2026. Pour le gouvernement, cet
effort financier est justifié par les profits importants dégagés
par le secteur avant et pendant la crise sanitaire : 900 millions
d’euros de bénéfice en 2019, 1,6 milliard en 2020, 3 milliards en
2021.
Les biologistes prêts à faire 685 millions d’euros d’économie sur quatre ans
Les biologistes médicaux n’entendent pas être pointés du doigt
comme profiteurs de guerre sans réagir. Selon eux, une baisse de la
cotation des actes courants mettrait en péril le maillage
territorial des laboratoires privés et empêcherait tout
investissement en faveur de l’innovation. La cotation actuelle
n’est, selon les syndicats, même pas suffisante pour couvrir leurs
coûts qui ont été majorés par l’inflation. Si économies budgétaires
il doit y avoir, elles doivent porter sur les bénéfices liés à
l’épidémie de Covid-19, pas sur les actes courants.
Les premières négociations entre les biologistes et
l’Assurance maladie ont rapidement tourné court, d’où la première
grève de mi-novembre. Après ce premier mouvement « social », les
syndicats ont finalement accepté de revenir à la table des
négociations, après que le Sénat ait voté un amendement limitant
l’effort budgétaire à 250 millions d’euros en 2023 portant sur les
bénéfices liés à la Covid-19.
Ce mardi, en signe de bonne volonté, les membres de l’APM ont
avancé une nouvelle proposition, consistant à réaliser 250 millions
d’euros d’économie en 2023, puis 145 millions d’euros par an entre
2024 et 2026, soit 685 millions d’euros de baisse tarifaire,
l’équivalent de 80 % des bénéfices réalisés par le secteur privé de
la biologie médicale durant la crise sanitaire. Mais les syndicats
n’ont reçu aucune réponse claire du directeur de la CNAM Thomas
Fatôme, qui s’est contenté de les convier à une nouvelle réunion de
travail et ont donc appelé à une nouvelle grève.
Biologistes, libéraux et internes : c’est la convergence des luttes !
C’est désormais une bataille de communication qui s’engage
entre les biologistes et l’exécutif. Alors que le ministre de la
Santé François Braun estime que ces grèves sont « inconséquentes,
inadmissibles et contraires à la déontologie », la Pr Antoinette
Lemoine prend à parti l’opinion publique dans une tribune publiée
dans le journal Le Monde ce jeudi. Elle rappelle que, durant la
crise sanitaire, « les Français ont pu compter comme jamais
auparavant sur leurs laboratoires » et que le dépistage massif
de la population n’aurait pas pu être mis en place sans le réseau
de laboratoires privés. « En refusant de négocier avec les
laboratoires privés un rééquilibrage de leurs recettes
exceptionnelles, le gouvernement s’apprête à détruire cette force
qui fait notre fierté » s’insurge la biologiste médicale
hospitalière.
Rappelons que le 1er décembre est également la date prévue
pour une grande grève des médecins libéraux, tandis que les
syndicats d’internes appellent à des grèves les 11 et 12 décembre.
Ce sont donc des semaines difficiles sur le plan social qui
s’annoncent pour le ministre de la Santé.
Nicolas Barbet