
« Tous vaccinés, tous protégés ». Le grand slogan de
l’année 2021 a vécu. Depuis le printemps dernier et la baisse
d’intensité de la pandémie, la vaccination de rappel (quatrième et
même cinquième dose pour certains) est désormais uniquement ciblée
sur les personnes les plus à risques de développer une forme grave
de la Covid-19. Un ciblage parfois un peu trop complexe, qui
dessert la cause de la vaccination.
A priori pourtant, à la lecture du communiqué de la Direction
générale de la Santé (DGS) du 21 novembre dernier sur le sujet, la
liste des personnes éligibles à une nouvelle dose de vaccin est
assez claire : les résidents d’Ehpad et USLD, les sujets âgés de 60
ans et plus, les personnes immunodéprimées, celles souffrant d’une
ou plusieurs comorbidités et les femmes enceintes dès le premier
trimestre de grossesse.
Au moins 6 mois après la dernière dose…et 3 mois après la dernière contamination !
Mais la question se complexifie lorsqu’on se penche sur les
délais de revaccination. Pour les sujets âgés de plus de 80 ans,
les résidents d’Ehpad ou d’USLD et les personnes immunodéprimées,
la vaccination de rappel doit être faite au moins 3 mois après la
dernière injection ou contamination par la Covid-19. Pour toutes
les autres personnes éligibles, la vaccination doit être réalisée
au moins 6 mois après la dernière injection…mais également au moins
3 mois après la dernière contamination. Pour rajouter à la
complexité de la situation, rappelons que les sujets de moins de 30
ans ne peuvent pas recevoir les vaccins du laboratoire Moderna, qui
augmenteraient le risque de myocardite.
Quid des personnes qui ne figurent pas dans cette liste de
personnes éligibles à la dose de rappel ? Selon la DGS, « les
personnes vivant dans l’entourage ou en contact régulier avec des
personnes immunodéprimées ou vulnérables » peuvent également se
faire administrer une dose de rappel (à condition bien sur de
respecter les délais évoqués plus haut). Cela inclut les
professionnels de santé, pour qui la dose de rappel n’est donc pas
obligatoire, argument de plus utilisé pour contester le maintien de
la suspension des soignants non-vaccinés.
Pourtant, plusieurs personnes de moins de 60 ans en bonne
santé ayant voulu se faire vacciner pour protéger leurs proches ont
rapporté s’être fait « refoulés » par les pharmaciens, qui ont
refusé de les vacciner en l’absence de prescription médicale. «
Ce n’est pas normal, une personne qui veut se faire vacciner peut
se faire vacciner » a réagi le ministre de la Santé François
Braun le 20 novembre dernier. Pourtant, interrogé par les
journalistes du Parisien, le ministère de la Santé indique que si
un individu qui ne fait pas partie du public cible souhaite se
faire vacciner, « il revient au professionnel de santé d’évaluer
l’opportunité de le vacciner ou non, en fonction de la balance
bénéfice-risque au cas par cas ».
La vaccination est-elle déjà ouverte à tous ?
Mais l’imbroglio s’est encore intensifié ce mardi, lorsque la
Pr Brigitte Autran, présidente du Comité d’anticipation et de
veille d’anticipation des risques sanitaires (Covars), a déclaré au
micro de Franceinfo que « toute la population pouvait se faire
vacciner », semblant faire voler en éclat les règles précitées. Une
information confirmée par la Fédération des syndicats
pharmaceutiques de France (FSPF), qui indique qu’il « n’y a pas
besoin d’ordonnance, vous venez et on vous injecte le vaccin sans
autre difficulté ». Mais l’autre grand syndicat d’officinaux,
l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), dit
attendre « une consigne claire du ministère nous disant de
vacciner tous les gens qui nous le demandent ».
« Le message n’est pas clair, il ne tient pas sur une affiche
simple, c’est un tableau compliqué » regrette le Pr Antoine
Flahault. « Peu importe l’âge, on aurait dû dire à tout le monde
: votre dernière dose date d’il y a plus de 6 mois, faite vous
vacciner » explique l’épidémiologiste genevois. Une complexité
qui explique en partie l’échec cuisant de la campagne de
vaccination de rappel. Selon le dernier bilan de Santé Publique
France (SPF), publié jeudi dernier, seulement 13 % des plus de 80
ans et 31,6 % des 60-79 ans sont à jour de leur vaccination. Par
comparaison, au Royaume-Uni, toutes les personnes éligibles à une
dose de rappel reçoivent un courrier officiel des autorités : 80 %
des Britanniques de plus de 70 ans ont été vaccinés cet
automne.
Nicolas Barbet