
Paris, le lundi 26 décembre 2022 – Dénonçant une situation de saturation des urgences et une suractivité des centres 15, le syndicat Samu-Urgences de France demande au gouvernement de lancer un plan blanc national.
Services d’urgences saturés, manque de lits d’hôpitaux, pénurie de soignants, médecins débordés et surmenés : des termes qui reviennent malheureusement très souvent pour décrire la situation dans les hôpitaux français. En cette période de fêtes où une partie du personnel soignant est en vacances, la situation est particulièrement difficile, d’autant plus que notre pays est actuellement touché par une triple épidémie d’infections hivernales (Covid-19, grippe, bronchiolite) qui crée un afflux important de patients.
C’est ainsi un tableau particulièrement noir de la situation hospitalière qu’a dressé vendredi dernier, veille du week-end de Noël, le Dr Marc Noizet, président du syndicat Samu-Urgences de France, interrogé sur les antennes de France info. « Les centres 15 sont sursollicités comme ils ne l’ont jamais été » explique le chef du service des urgences de l’hôpital de Mulhouse et du SAMU du Haut-Rhin. « Nous avons constaté il y a deux semaines plus 20 % d’activité par rapport à décembre 2021 et la semaine dernière plus 55 % d’activité », alors même que l’activité avait déjà été très importante il y a un an en raison du début de la vague Omicron.
Les hôpitaux multiplient les plans blancs
« Les hôpitaux sont saturés comme tous les ans en fin d’année, mais la différence cette année c’est que nous avons fermé 15 à 20 % de nos lits à cause de problématiques de démographie médicale dans le monde hospitalier » poursuit l’urgentiste. Dénonçant une crise systémique qui touche l’ensemble de l’hôpital, il explique que « les services d’urgences n’arrivent plus à se vider, parce qu’il n’y a plus de places d’hospitalisation ». Le Dr Noizet évoque notamment le problème des patients qui attendent d’être pris en charge sur des brancards dans des couloirs, « pendant un, deux ou trois jours ». « Depuis décembre, nous mesurons les morts inattendues dans les services d’urgence et on estime que 17 patients n’auraient pas dû mourir ».
Pour le syndicaliste, la solution face à cette situation grave s’impose : il faut déclencher un plan blanc national « qui permet la mobilisation de moyens exceptionnels », notamment en ce qu’il rend possible le rappel du personnel en repos, la mobilisation des établissements privés et les déprogrammations. Plusieurs hôpitaux ont déjà déclenché des plans blancs pour faire face à la situation épidémique, notamment en Alsace et en Bretagne, tandis que l’Agence régionale de santé (ARS) de Corse a décidé de déclencher un plan blanc régional. Pour l’instant, le gouvernement se refuse à enclencher un plan blanc national, comme ce fut le cas lors de la première vague de Covid-19 en mars 2020. Selon le Dr Noizet, la Première ministre Elisabeth Borne aurait exclu pour le moment de recourir à cette option, « estimant que la situation sanitaire n’était pas suffisamment grave ».
La Covid et la bronchiolite reculent, la grippe progresse
« Il ne faut pas attendre d’être dans le mur pour réagir » réagit le syndicaliste, qui ne jette cependant pas la pierre au gouvernement. Il a ainsi salué les propos du ministre de la Santé François Braun qui a reconnu lors d’une visite à l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis jeudi dernier une « situation critique au niveau du système de santé » et a salué « la remarquable union sacrée » des soignants. « Des paroles rassurantes dont les professionnels de santé ont besoin » a commenté le Dr Noizet, qui a succédé au Dr Braun à la tête du syndicat Samu-Urgences de France.
Seule lueur d’espoir pour les urgentistes dans ce tableau bien sombre, le recul des épidémies de bronchiolite et de Covid-19. Pour la bronchiolite, le dernier bilan de Santé Publique France (SPF) fait état d’une baisse de 24 % des passages aux urgences et de 23 % des hospitalisations au cours de la semaine du 12 décembre. Sur le front de la Covid-19, le nombre de contaminations quotidiennes est en forte baisse (-39 % en deux semaines) tandis que le nombre d’hospitalisations commence lentement à diminuer (-1 % d’hospitalisations conventionnelles et -3 % d’admissions en soins critiques sur la semaine). En revanche, l’épidémie de grippe continue de progresser très fortement, avec une hausse des passages aux urgences pour syndrome grippal de 84 % et des hospitalisations de 118 % lors de la semaine du 12 décembre.
Grégoire Griffard