
La kératoconjonctivite vernale (KCV) est une maladie oculaire se traduisant par une inflammation chronique de la conjonctive palpébrale et/ou bulbaire, habituellement bilatérale. Dans les formes sévères, l’évolution prolongée peut conduire à l’apparition d’anomalies cornéennes avec à terme une perte de la vision irrémédiable. Cette rare maladie (3,2 pour 10 000 en Europe de l’Ouest), un peu plus fréquente dans les pays à fort ensoleillement, apparaît le plus souvent dans l’enfance, vers 5 à 6 ans, et tend à se résoudre à la puberté. Elle se manifeste habituellement de manière saisonnière du printemps à l’automne mais peut aussi être perannuelle.
Ce mode évolutif pendant la saison pollinique suggère que la KCV est secondaire à une réaction d’hypersensibilité à des allergènes de l’environnement, hypothèse d’autant plus plausible qu’environ la moitié des patients atteints de KCV ont d’autres manifestations allergiques : dermatite atopique, asthme, eczéma.
Une revue systématique de la littérature avec méta-analyse a été effectuée pour préciser la prévalence des cas de KCV avec tests allergiques positifs et identifier les allergènes en cause.
Des tests positifs dans plus de 57 % des cas
Onze bases de données ont été exploitées jusqu’à la date du 24 mai 2021pour cette recherche. Trente-trois études ont été retrouvées, la plupart menées en milieu ophtalmologique et regroupant 2 122 patients avec KCV.
Globalement il est apparu que 57,7 % de ces patients présentaient des tests allergiques positifs, ce qui était bien supérieur à la prévalence chez les sujets témoins appariés. Au test de provocation conjonctivale, réalisé dans deux études (N = 205), 51,4 % des patients avaient un résultat positif. Des IgE ont été décelées dans les larmes de 68,7 % des cas, spécifiques dans 58,9 % des observations (pollen, poussière de maison surtout…) et 58,2 % des sujets avaient des prick tests cutanés positifs.
La KCV n’est pas une affection allergique à proprement parler mais elle est dans la même ligne que l’asthme ou la dermatite atopique, qui s’accompagnent de sensibilisations diverses. Identifier les allergènes en cause offre l’opportunité à la fois d’éviter autant que possible d’y être exposé mais aussi de proposer un traitement spécifique de l’allergie notamment par immunothérapie, efficaces dans les allergies au pollen et aux acariens de la poussière de maison. Cette approche est susceptible d’améliorer la prise en charge, difficile, de la KCV.
Dr Marie-Line Barbet