Rennes, le lundi 17 octobre 2022 – Vent debout contre les
restrictions budgétaires inscrites dans le PLFSS, les biologistes
libéraux menacent de passer à l’action.
Grève générale, le mot est à la mode. Si l’on parle
essentiellement dans l’actualité de celle des employés des
raffineries, des centrales nucléaires ou de la RATP, une autre
profession essentielle pourrait bientôt aussi se mettre en grève :
les biologistes médicaux. Ce vendredi, l’Alliance de la biologie
médicale (APBM), qui regroupe syndicats de praticiens et principaux
groupes de laboratoires d’analyse, a exprimé dans un communiqué sa
colère contre les coupes budgétaires prévus dans le projet de loi
de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2023,
actuellement débattu au Parlement.
« Nous pourrons mettre en œuvre une grève générale
d’ampleur, à l’issue du vote du PLFSS, en fonction des réponses du
gouvernement » a averti Catherine Courboillet, présidente du
groupe Cerba HealthCare.
Les biologistes médicaux prêts à payer une « contribution
exceptionnelle » Covid-19
L’origine de la colère des laboratoires d’analyse réside dans
l’article 27 du PLFSS, qui dispose que si les biologistes médicaux
ne parviennent pas d’ici le 1er février prochain à un accord avec
l’Assurance maladie prévoyant 250 millions d’euros de baisse de
tarifs dès 2023 sur les « actes de biologie médicale non liés à
la gestion de la crise sanitaire », ces baisses pourront être
décidés unilatéralement par le gouvernement, avec prolongation
jusqu’en 2026.
L’exécutif justifie cet effort budgétaire par les profits
importants que les laboratoires de biologie médicale ont généré (en
moyenne) à l’occasion de la crise sanitaire, avec une hausse
de rentabilité de 23 % en 2020.
Mais les biologistes médicaux refusent d’être « pointés du
doigt en profiteur de guerre ». Rappelant leur «
mobilisation contre la Covid-19 depuis plus de deux ans pour mettre
en œuvre la stratégie de dépistage décidée par les autorités »,
ils se disent prêt, en signe de bonne volonté, à payer une «
contribution exceptionnelle fléchée sur l’activité liée à la
Covid19 » et à « investir massivement dans la permanence des
soins et les soins non programmés ».
Selon les représentants de la profession, la biologie médicale
a déjà largement contribué à la maitrise des dépenses de santé,
leurs efforts ayant permis à la Sécurité Sociale de faire 5,2
milliards d’euros d’économie en 10 ans. « La biologie médicale
de proximité ne pourra pas surmonter une telle ponction et en
sortira forcément dégradée avec comme conséquences moins de
laboratoires de proximité, moins d’offres de soins, moins
d’investissement dans l’innovation et moins d’emplois dans les
territoires » prévient l’APBM.
Un arrêté de réquisition suspendu à Rennes
Les biologistes médicaux ont déjà subi un premier revers à
l’Assemblée Nationale avec le rejet par la commission des affaires
sociales des amendements limitant ce coup de rabot budgétaire à la
seule année 2023. Au contraire, les députés ont voté un amendement
imposant aux laboratoires de « maintenir leurs différents sites
sur le territoire ». Une décision « schizophrénique »
selon le syndicat national des médecins biologistes (SNMB). D’où
désormais, cette menace de lancer un mouvement de grève.
A Rennes, les employés de la société des Laboratoires de
biologie réunis (LBR) n’ont pas attendu pour se mettre en grève dès
ce vendredi. Sauf qu’il s’agit cette fois d’une grève dirigée
contre leur direction, à qui ils demandent une hausse de salaire
indexée sur l’inflation. Le préfet d’Ille-et-Vilaine avait pris ce
jeudi un arrêté de réquisition de 55 membres du personnel, afin que
la grève ne perturbe pas la politique de dépistage de la Covid-19,
en pleine 8ème vague épidémique. Un arrêté qui a été suspendu ce
mardi par le tribunal administratif de Rennes, qui a jugé qu’il
portait une « atteinte grave et manifestement illégale à la
liberté fondamentale que constitue le droit de grève ».
La biologie comme la pharmacie sont des piliers essentiels de la médecine, dont le bon usage est un facteur-clé de la qualité des soins. Le problème est qu'elles sont rémunérées au volume vendu, non au service rendu. Dire que la biologie contribue à "la maîtrise des dépenses de santé" est une blague (ce à quoi elle contribue est la gabegie dépensière et l'enrichissement de ses actionnaires). Mais disons-le, biologistes et pharmaciens se contentent d'exploiter le désastreux mésusage des analyses et des médicaments qu'autorise un système de santé défaillant.