Saint-Denis (La Réunion), le mercredi 15 mai 2019 – Le décès
l’année dernière d’une femme atteinte de la rougeole qui pourrait
avoir été contaminée alors qu’elle accompagnait un proche au CHU de
Poitiers avait rappelé comment cette maladie, très contagieuse,
peut devenir une infection nosocomiale. La situation actuelle au
CHU de Bellepierre à Saint-Denis la Réunion l’illustre également en
rappelant le rôle essentiel de la vaccination des professionnels de
santé.
Deux médecins contaminés, contaminants à leur
tour
Comme le reste du monde, l’Océan Indien est touché par la
résurgence de la rougeole. Ainsi, une épidémie ayant atteint entre
1 500 et 2 000 personnes sévit actuellement sur l’île Maurice,
tandis que 140 000 ont été déplorés à Madagascar. En raison de ses
nombreux échanges avec ses deux pays, la Réunion ne pouvait être
épargnée. Deux premiers cas, concernant des voyageurs en provenance
de Madagascar, ont ainsi inévitablement été détectés en décembre
2018. Depuis, le nombre d'observations n’a cessé de progresser pour
atteindre 42 personnes infectées il y a un mois. Enfin, au cours
des quatre dernières semaines, sept cas supplémentaires ont été
enregistrés.
Parmi eux, six ont plus particulièrement retenu l’attention de
l’Agence régionale de Santé (ARS) de l’Océan Indien. Ils concernent
en effet tous des patients du CHU de Bellepierre. Les
investigations menées par l’ARS ont permis de déterminer que deux
médecins, eux-mêmes possiblement précédemment contaminés par des
patients qu’ils avaient pris en charge aux urgences, étaient très
probablement à l’origine de ces six cas de rougeole.
Cent personnes vaccinées en deux jours
Aucune information précise sur les médecins (notamment leur âge)
n’a été transmise par l’ARS OI et par les médias réunionnais qui
ont révélé l’affaire (notamment Imaz press Réunion). Les raisons de
l’absence de vaccination (ou d’absence de vaccination complète ?)
des deux praticiens n’ont pas plus été dévoilées. L’accent a plus
certainement été mis sur l’action déployée rapidement par l’ARS :
recherche des antécédents vaccinaux et ou d’infection pour 500
personnes susceptibles d’avoir été en contact avec les médecins et
vaccination d’une centaine de salariés de l’hôpital en deux
jours.
Non obligatoire, mais fortement recommandée
Ce cas rappelle que la vaccination contre la rougeole ne fait
pas partie des vaccinations obligatoires pour les professionnels de
santé. Cependant, dans son calendrier vaccinal publié en mars, le
ministère de la Santé insiste : « Les personnes nées avant 1980,
non vaccinées et sans antécédent connu de rougeole ou de rubéole,
qui exercent des professions de santé en formation, à l’embauche ou
en poste, doivent recevoir une dose de vaccin trivalent
rougeole-oreillons-rubéole. La vaccination avec une dose de vaccins
trivalent ROR est fortement recommandée pour les personnes
travaillant dans les services accueillant des patients à risque de
rougeole grave ».
Couverture vaccinale insuffisante des internes
Si les données en la matière sont rares, des travaux publiés en
2015 dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) avaient
permis de redouter que la couverture vaccinale des internes en
médecine et en pharmacie par le vaccin ROR sans être catastrophique
ne soit pas optimale. L’étude menée au printemps 2013 auprès
d’étudiants marseillais (majoritairement nés après 1983, soit la
date d’introduction de la vaccination) signalait que si 93 % des
étudiants en médecine et 94 % de ceux en pharmacie avaient reçu au
moins une dose de vaccin contre la rougeole, la proportion de ceux
ayant reçu deux doses descendait à 76 % en médecine et 82 % en
pharmacie (ce qui pouvait en partie s’expliquer par le fait que
l’introduction de la seconde dose remonte à 1996). L’incomplétude
de la vaccination était notamment expliquée par l’oubli et le
désintérêt (avancés par 33 % des internes pas parfaitement
vaccinés) et le fait d’avoir été contaminés par la rougeole (28 %).
L’année dernière après le décès d’un jeune homme atteint d’un
déficit immunitaire congénital l’empêchant d’être vacciné, Santé
Publique France (SPF) avait exhorté : « La mise en évidence de
plusieurs foyers nosocomiaux doit inciter les soignants à mettre
rapidement à jour leur propre statut vaccinal vis-à-vis de la
rougeole ».
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