Crise des urgences : la faute aux patients ou au management ?

Paris, le vendredi 30 août 2019 - Ni la nouvelle « prime forfaitaire de risque » mensuelle de 100 euros net, ni les aides aux établissements les plus en difficulté n’auront suffi à mettre un terme au mouvement de grève des urgences.

Aussi, les personnels de santé réclament toujours le recrutement de 10 000 paramédicaux et une revalorisation salariale de 300 euros net mensuels.

Certes, des accords permettant une sortie de crise ont été obtenus, notamment à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), mais, malgré tout, le collectif Inter-Urgences estime que le seuil de 240 services en grève pourrait être atteint lundi 2 septembre (ils seraient 233 aujourd’hui), puis celui de 250 à la fin de semaine : « la traversée de l’été, c’était la traversée du désert, on risquait d’y laisser des plumes, mais on se retrouve fin août deux fois plus nombreux qu’en juin » se félicite Hugo Huon, infirmier aux urgences parisiennes de Lariboisière et président du collectif auprès du journal Le Monde.

Au ministère de la santé, on comptabilise 195 SAU en grève avant un nouveau chiffrage dans les prochains jours : « c’est un mouvement relativement stable, sans aggravation ni décélération majeure »  tempère l’Avenue de Ségur.

Difficile néanmoins d’imaginer que la rivière entre dans son lit à la rentrée alors qu’une assemblée générale du collectif Inter-Urgences est prévue le 10 septembre durant laquelle doit être validée une « plateforme de revendications » qui permettra aux syndicats de médecins hospitaliers de s’associer au mouvement, tout comme les soignants d’autres spécialités.

De l’autre côté, au ministère de la santé, on promet un « chamboulement des organisations » déjà raillé par les grévistes.

Consumérisme médical

Dans ce contexte à couteaux tirés, Agnès Buzyn était l’invitée d’un débat sur la santé organisé à l’occasion de l’université d’été du MEDEF. S’exprimant sur la crise, elle a évoqué le problème du « consumérisme médical : la consommation de soins a complètement changé dans notre pays (…). Quand on a un enfant avec de la fièvre à 8 heures du soir, plus personne ne téléphone à un médecin pour essayer d'avoir un rendez-vous le lendemain. On se rend avec notre enfant aux urgences parce qu'on va avoir la biologie, un examen clinique, peut-être une radio des poumons. Ça va nous rassurer. En réalité, les urgences sont la porte d'entrée du système de soins, quelle que soit la pathologie, l’âge, etc. Nous devons donc repenser le système à l'aune de ce consumérisme médical ou chacun cherche l'immédiateté du diagnostic et des examens, où plus personne ne tolère d'attendre deux jours un rendez-vous. »

Patrick Pelloux, lui aussi présent, a quant à lui préféré dénoncer « le management à l'hôpital, souvent très narcissique et pervers »…

Xavier Bataille

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Vos réactions (6)

  • Chercher le coupable ?

    Le 30 août 2019

    Le caractère tendancieux du titre laissant supposer de manière binaire UN coupable m'attriste.
    C'est peut être toute la société qui est à revoir ? Provocation ? À peine !
    Comme par hasard, je suis dans le service de pédiatrie pour des raison persos, je suis passé aux urgences et j'assiste ( il y a 20 mn) à une scène :
    Un couple embolisant le couloir et focalisant l'attention de tous. Lui, hurlant : "je vais me mette à hurler si ça continue !" Je t'ai dit (à la femme qui se met aussitôt à hurler aussi!) qu'il fallait appeler les pompiers ! Je serais sur un brancard et on s'occuperait de moi.
    Je suis parti avec un irritation qui cède le pas à cette sensation doucereuse d'avoir quitté le cloaque où une catégorie de personnes est convaincue que tout lui est du.
    À quand les cours de karaté pour les urgentistes ?

    Dr Rachid Chougar

  • Réorganisons l'offre de soins

    Le 30 août 2019

    Il me paraît normal que des parents s'inquiètent si leur enfant a de la fièvre (pour reprendre l'exemple de l'article). Plutôt que de le critiquer, réorganisons l'offre de soins, mais en dégraissant les urgences actuelles, en créant des maisons de santé, avec médecin (!), et/ou des équipes type SOS médecin, qui gèreront l'immense majorité des "urgences" à leur domicile ou quasiment, laissant les équipes actuelles, efficaces, prendre en charge avec sérénité les vraies urgences. Là, avec en outre, l'empathie pour chaque patient, se trouve une grande partie de la solution !

    M. J.

  • Organisation dans le passé

    Le 31 août 2019

    Certes il y a un consumérisme médical plus personne ne veut attendre devant une pathologie bénigne.
    Néanmoins lorsque j’étais étudiant de garde aux urgences il y avait au moins trois ou quatre externes, un interne est un chef de clinique ce qui permettait une régulation aisée. Nous les externes faisions l’examen clinique les points de sutures et la bobologie. Nous appelions l’interne si le problème était plus sérieux une fracture par exemple.

    Aujourd’hui l’accueil est fait par un infirmier régulateur qui ne connaît strictement rien à la médecine comment voulez-vous que cela fonctionne ?

    Dr Dominique Robine

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