Covid-19 : où sont les masques ?

Paris, le lundi 2 mars 2020 – Pour assurer une prise en charge des patients potentiellement infectés par le Covid-19 en médecine de ville qui ne mette pas en péril la continuité des soins (en raison de la contamination possible des praticiens), la distribution de masques et de matériels de protection aux professionnels de santé libéraux apparaît indispensable. Le sujet a commencé à être sérieusement abordé il y a une dizaine de jours. Cependant, autour du 20 février, l’approvisionnement des praticiens n’était encore considéré que comme une possibilité.

Les choses se sont précisées la semaine dernière avec l’annonce jeudi par le ministre de la Santé du positionnement des masques dans les officines. Cependant, ce lundi 2 mars, les pharmacies n’ont toujours pas reçu les dispositifs tant attendus et les stocks dont elles disposaient sont désormais épuisés.

Livraison attendue mercredi

Le président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), Gilles Bonnefond affirme que quinze millions de masques, diffusés via l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), vont parvenir à partir d’aujourd’hui aux grossistes-répartiteurs. Cinq millions de ces masques chirurgicaux sont destinés aux hôpitaux et dix millions aux officines de ville. Ces dernières devraient recevoir chacune dix kits contenant 50 masques à partir de mercredi, ce que Gilles Bonnefond, interrogé par le JIM considère comme une « performance ».

Communication erratique

Un enthousiasme qu’est loin de partager le président de l’Union française pour une médecine ville, Jérôme Marty, également interrogé par le JIM. Le praticien évoque pour sa part une « communication erratique ». S’il se dit conscient que l’évolution de l’épidémie explique des discours changeants, il a aujourd’hui le sentiment d’être confronté à une communication qui s’adapte à la constatation du manque de moyens. Aujourd’hui, il déplore que les masques qui seront disponibles ne seront pas des appareils respiratoires de type FFP2, pourtant les plus utiles aux professionnels de santé pour ne pas être contaminés par des patients.

Quid de la protection des personnes fragiles ?

Le docteur Jérôme Marty évoque une seconde problématique, plus préoccupante encore : le déficit en masques des services accueillant des personnes à risque (Établissement hébergeant des personnes âgées dépendantes, services de soins de suite et de réadaptation…). « Nos retours du terrain suggèrent l’impossibilité de nombreux services d’assurer la protection de leurs patients » nous confie-t-il. Le docteur Marty s’interroge enfin sur le caractère inopérant de la comptabilité du nombre de cas déclinée chaque soir, qui ne tient nullement compte des nombreux patients asymptomatiques. Il suggère de faire participer le Réseau Sentinelles, qui œuvre déjà chaque année pour l’évaluation de l’épidémie de grippe, ce qui permettrait une appréciation plus fine, mais il déplore qu’en la matière, une nouvelle fois, une logique « hospitalo-centrée » ait été préférée. En tout état de cause, il s’interroge sur la préparation des autorités en ce qui concerne l’approvisionnement en matériel.

Flou sur le retrait des masques par les professionnels

Les témoignages de ces deux responsables suggèrent en tout état de cause que de nombreuses questions restent en suspens. D’abord, on peut remarquer que la communication officielle n’a jamais fait mention de l’attitude à tenir vis-à-vis des visites aux personnes hospitalisées ou accueillies dans des établissements de moyen séjour. Par ailleurs, l’incertitude demeure quant à la distribution des masques.

Ainsi, alors qu’un mail du 28 février de la Direction générale de la Santé évoque des « bons de retrait » qui seront envoyés aux médecins généralistes, Gilles Bonnefond évoque pour sa part une distribution sur présentation du numéro RPPS du professionnel (pas seulement médecin) et une traçabilité réalisée par les officines.

Et demain ?

Quant à l’avenir, les flous sont également légions. Les informations dont dispose le Dr Jérôme Marty suggèrent que des masques FFP2 ont finalement été commandés (alors qu’ils étaient annoncés comme disponibles la semaine dernière, remarque le patron de l’UFML) mais ne pourraient pas être disponibles avant la mi-mars, tandis que Gilles Bonnefond évoque pour sa part une possible deuxième vague de distribution de masques chirurgicaux, mais dont les conditions demeurent inconnues, notamment aux personnes considérées comme prioritaires…dont on attend la liste.

Aurélie Haroche

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Vos réactions (2)

  • Le masque FFP2 à l’essai...

    Le 03 mars 2020

    Beaucoup se plaignent en ville de ne pas être dotés de masques du type FFP2. En disposant, je refais ce jour l’essai de son utilisation, par comparaison avec le masque dit chirurgical qui est en fait un masque de soins connus de tous, soignants comme malades, et qu’on peut garder avec l’habitude une ou deux heures sans difficulté. Le masque FFP2 est plus épais et aussi plus étanche, surtout grâce à l’effet de deux élastiques remplaçant les habituels lacets à nouer, passant pour l’un derrière la nuque, pour l’autre au dessus des oreilles et qui plaquent ce masque au dessus du nez et sous le menton, pour en rendre l’étanchéité optimale. Il est confortable, on a devant la bouche et le nez une petite réserve d’air, mais j’ai été bien content de le quitter après un quart d’heure...
    Je vous souhaite à tous d’en disposer rapidement, surtout si vous recevez des patients contaminés et tousseurs.

    Dr Bernard Dumas

  • Utilisation du masque FFP2

    Le 08 mars 2020

    Oui le port du masque FFP2 est difficile à supporter plus de qq dizaines de minutes. Il est dit que si l'on touche le masque avec les mains possiblement contaminée il va perdre ses capacités.
    La réutilisation n'est pas possible donc il faut avoir du stockage.

    Dr Pascal Pozzi

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