
Une demande en forte augmentation
Cette demande accrue s’explique par de multiples facteurs. D’abord, les prescriptions de tests PCR sont en augmentation, non seulement parce qu’elles sont plus systématiquement délivrées en cas de suspicion clinique, mais aussi parce que dans certaines localités, la circulation du virus est plus active. De la même manière, les préconisations de surveillance élargie autour des clusters supposent la multiplication des tests.Des moyens restreints
Parallèlement, dans les laboratoires médicaux, les moyens sont réduits. D'une part, longtemps en recul, l’activité habituelle des laboratoires d’analyse est désormais semblable à l’accoutumée, voire en légère augmentation compte tenu de la réouverture des blocs opératoires ou de la reprise par exemple des actes de procréation médicalement assistée, avec une volonté d’essayer de rattraper en partie le retard pris. D'autre part, une partie des personnels est aujourd’hui en congés ; tandis que les obligations de désinfection des locaux allongent les temps de prélèvement ou complexifient les organisations.Priorité aux symptomatiques !
Face à cette situation, le gouvernement doit tenir à la fin de semaine une réunion avec les acteurs concernés. Plusieurs pistes sont à l’étude. Certaines mesures ont déjà été prises, telle l’autorisation donnée aux techniciens de laboratoire de réaliser des prélèvements. Le recours aux étudiants en médecine et aux chirurgiens-dentistes pourrait être également envisagé. Des transferts de professionnels des régions connaissant de faibles demandes vers d’autres plus en tension pourraient également être envisagés. Le président du Syndicat national des biologistes, François Blanchecotte estime également qu’un important levier d’action concerne l’assouplissement de certaines contraintes administratives qui « nous prennent trop de temps ». Les discussions pourraient également aboutir à multiplier les centres de prélèvement, notamment de type drive-in qui permettent d’économiser le temps de désinfection.Enfin, des recommandations pourraient (devraient) être prises pour donner la priorité aux patients symptomatiques. C’est la préconisation de nombreux observateurs, de François Blanchecotte à Aurélien Rousseau, président de l’Agence régionale de santé d’Ile de France en passant par le président du Conseil scientifique, Jean-François Delfraissy.
Tests pour tous : une utopie dangereuse !
On voit que ce contexte n’est pas favorable à l’application immédiate du souhait formulé par le Président de la République, qui lors de son allocution du 14 juillet a déclaré : « Nous allons permettre à toute personne sans prescription médicale, même quand elle n’a pas de symptômes, si elle a un doute, une crainte, de pouvoir aller se faire tester ». Alors que l'accessibilité aux tests est aujourd’hui critique, une telle perspective ne peut qu’inquiéter les biologistes, d’autant plus que pour permettre de s’assurer de son "statut", les tests devraient être régulièrement répétés. « S’il faut retester des millions de gens tous les 15 jours, ça ne va pas être possible » prévient ainsi dans le Monde, le président du Syndicat national des biologistes.Ainsi, on le devine, la réunion de cette semaine a également une visée diplomatique alors que les tensions s’exacerbent entre les laboratoires d’analyse et les autorités. Ainsi, par exemple une campagne de dépistage massif dans les Hauts de France a été lancée sans préparation possible des biologistes : « La liste des 72 communes concernées nous avait été communiquée à la dernière minute, et nos standards se sont retrouvés submergés d’appels », explique ainsi Jean-Charles Dugimont, vice-président du Syndicat des biologistes. Les professionnels ont donc dû dans l’urgence mettre en place une plateforme pour organiser la prise de rendez-vous.
Éviter ce type de couac à l’avenir et limiter les déclarations d’intention contre productives apparaissent indispensables pour permettre une organisation sereine et efficace du dépistage.
Aurélie Haroche