
Bruxelles, le mardi 22 décembre 2020 – « Du temps où les
demandes d'Autorisation de mise sur le marché (AMM) étaient
transmises par papier, cela aurait représenté un camion entier
». La comparaison d’Harald Enzmann, président du Comité des
médicaments à usage humain (CMUH) de l’Agence européenne du
médicament (EMA) est destinée à démontrer l’ampleur des
informations analysées par les experts de l’agence pour accorder
son autorisation à Comirnaty, le vaccin des laboratoires
Pfizer/BioNTech contre la Covid-19, qui n’a nullement été limitée
par la rapidité de la procédure.
Homologation pleine en dépit d’informations complémentaires encore en attente
Un succès européen
Dans la foulée de l’accord donné par l’EMA, la Commission
européenne a validé l’AMM, avec une célérité détrompant les
premières indications suggérant qu’un délai de quarante-huit heures
pourrait être nécessaire. La présidente de la Commission
européenne, Ursula von der Leyen, qui a qualifié l’étape de
décisive s’est également félicitée que « le premier vaccin
contre la Covid-9 disponible en Europe soit un pur produit de
l’innovation européenne », faisant allusion au rôle déterminant
joué par le laboratoire allemand BioNTech dans sa conception. Si
les premières évaluations sont rassurantes sur la persistance de
l’efficacité de ce vaccin malgré la diffusion d’un nouveau variant
en Angleterre (comportant notamment une mutation sur la protéine
Spike), la Commission européenne a cependant tenu à répéter que la
vaccination ne permettait pas, en tout cas dans un premier temps,
de se libérer de toutes mesures barrières et autres contraintes,
notamment parce que le nombre de doses sera d’abord limité.
D’ailleurs, la validation de l’AMM de Comirnaty a été l’occasion de
nouveaux appels à la prudence en particulier en cette veille de
fêtes.
Coordination symbolique
Le communiqué de la Commission européenne a également donné
quelques informations succinctes sur le calendrier à venir. « La
Commission, les Etats membres et la compagnie (BioNTech)
travaillent maintenant pour une livraison des premières doses le 26
décembre », indique ainsi le texte. L’objectif est ensuite que
les premières vaccinations débutent les 27, 28 et 29 décembre dans
tous les pays d’Europe. Au-delà cependant de cette coordination
symbolique, les États demeurent souverains pour décider de leur
calendrier, alors que les niveaux de préparation différent en
fonction des pays, ainsi que les conditions
d’autorisation.
Personnes prioritaires : la DGS et la HAS se questionnent encore
En France, notamment, l’homologation de l’EMA doit être
doublée d’un accord de la Haute autorité de Santé qui doit
intervenir avant vendredi. Mais outre cette étape, la préparation
doit encore être consolidée sur de nombreux points. Concernant par
exemple la détermination des personnes prioritaires, en dépit des
premières recommandations publiées par la Haute autorité de Santé
(HAS) dès le 30 novembre, des ajustements sont encore en cours
comme en a témoigné la publication ce week-end de nouvelles
préconisations de la HAS en réponse à une saisine de la Direction
générale de la Santé (DGS) constatant « la priorisation en
fonction de l’âge versus les comorbidités n’est pas toujours très
claire ».
Pas de vaccinodromes mais des
supercongélateurs
Concernant la logistique, les zones d’ombre demeurent
également. On sait que le gouvernement est confronté à une équation
complexe : éviter que les médecins généralistes ne se sentent
écartés du processus ce qui pourrait avoir des conséquences
dommageables sur l’adhésion de la population tout en répondant au
défi que représentent les conditions de conservation particulières
du vaccin Pfizer/BioNTech. Sur ce sujet, Olivier Véran, a fait
remarquer hier « L’un des sens que nous voulons donner à cette
campagne française de vaccination, c’est celui de la confiance. Ne
nous précipitons pas. C’est pour cela que vous ne voyez pas
d’images de vaccinodromes ». L’absence de vaccinodromes censée
être un gage d’une campagne centrée sur la confiance ne permet
cependant pas de répondre à différentes questions
organisationnelles pressantes. Cependant, parallèlement, l’arrivée
des premiers supercongélateurs témoigne de l’amorçage de
l’organisation logistique. Une cinquante de super-congélateurs ont
été commandés qui doivent être répartis sur l’ensemble du
territoire : à Strasbourg, le dispositif a ainsi été installé hier.
Des tests sont désormais prévus pour vérifier le bon fonctionnement
du système avant qu’il reçoive les premières doses de vaccin. C’est
ainsi à partir des hôpitaux que sera réalisé l’approvisionnement
des EHPAD dépendants d’une structure hospitalière, alors que les
flacons décongelés peuvent être conservés pendant cinq jours entre
2 et 8 °C, et jusqu’à deux heures à température ambiante.
Cependant, concernant les autres types d’établissements, la
répartition devrait se faire à partir de six plateformes
dépositaires via Santé Publique France. De plus amples
informations sur cette architecture sont attendues autour du 25
décembre.
Vaccination à la française
Aurélie Haroche