Variant britannique (B1.1.7) : progression linéaire en France et mutation inquiétante en Grande-Bretagne

Paris, le jeudi 4 février 2021 – Les 27 et 28 janvier une enquête dite « flash » a été menée en France : elle a consisté à analyser les prélèvements positifs de ces jours là, d’une part en les criblant par des tests RT-PCR spécifiques et d’autre part en procédant au séquençage des échantillons doublement positifs. Les premiers résultats présentés hier par le professeur Bruno Lina, virologue et membre du Conseil scientifique, suggèrent que les différents variants recherchés représentaient (à ces dates) 14 % des cas d’infection par SARS-CoV-2 en France. Alors qu’un certain nombre de prélèvements doivent encore être séquencés, des résultats complémentaires seront présentés ce soir lors de la conférence de presse du Premier ministre. Dans la très grande majorité des cas c’est le variant B1.1.7 (dit « britannique ») qui est décelé, tandis que le variant 501Y.V2 (dit sud-africain) représenterait 1 à 2 % des infections et que quelques cas sporadiques du variant dit brésilien (B.1.1.28) ont été repérés.

Pas d’explosion

L’évolution par rapport aux 3,3 % de variants identifiés lors de la première enquête flash des 7 et 8 janvier met en évidence une progression « linéaire », mais non explosive a commenté le Professeur Lina. Ces chiffres coïncident avec les résultats des travaux qui auraient emporté la conviction du Président de la République de nous laisser du temps avant de décider d’un éventuel nouveau confirment indiquant que dans les pays sous couvre-feu.

Mutation préoccupante du variant en Grande Bretagne

Des disparités régionales s’observent, ainsi en Bretagne, Ile-de-France et Grand-Est la circulation des variants est plus marquée (20 % des infections sont le fait de variants). Dans les deux dernières régions, mais sans doute pas pour la première région, cette particularité rappelle que l’émergence de variants est favorisée par la pression de sélection : ainsi dans les zones où l’immunité naturelle pourrait être la plus importante, les variants sont plus susceptibles de se développer. La pression de sélection pourrait également être influencée par la stratégie vaccinale. Le Centre national d’information et de connaissances sur le coronavirus israélien  a ainsi alerté sur cet effet potentiellement contre-productif. De la même manière en Grande-Bretagne, certains se sont inquiétés. « Vacciner massivement alors que l’épidémie est active conduira inéluctablement à la sélection de mutants en échappement immunitaire et capables de résister au vaccin » relève le biologiste Claude-Alexandre Gustave. Cette mise en garde résonne d’une façon préoccupante après la découverte d’une nouvelle mutation du variant B1.1.7 repéré chez un petit nombre de patients britanniques. Pour onze personnes vivant dans le sud-ouest du pays selon les autorités et 32 autres dans la région de Liverpool selon la BBC, la lignée B1.1.7 présentait une nouvelle mutation baptisée E484K (ces sujets n’avaient majoritairement pas de lien entre eux, ce qui suppose une émergence « spontanée » de la variation). Inédite sur le variant B1.1.7, E484K est cependant loin d’être une inconnue. Elle caractérise les variants dits sud-africain et brésilien. Or, cette mutation pourrait être bien plus redoutable, car elle semble ne pas être systématiquement neutralisée par l’immunité naturelle et par celle induite par les vaccins. Moderna et Pfizer-BioNTech ont ainsi confirmé que cette mutation diminuait en partie l’efficacité de leurs vaccins (qui demeurerait cependant supérieure à 50 %). Ils ont également rappelé que l’un des nombreux avantages des vaccins à ARN-messager était de pouvoir être adaptés rapidement pour pouvoir répondre à la circulation de nouveaux variants.

Variants sans confinement nuiront-ils à la vaccination ?

Cependant, cette évolution de SARS-CoV-2, son adaptation (habituelle pour ce type de virus) à l’environnement qu’il rencontre (des personnes de plus en plus souvent immunisées, soit par la vaccination soit naturellement) pourrait être un argument supplémentaire pour ceux qui soutiennent la nécessité d’un confinement strict (plus encore alors que se déploie une campagne de vaccination afin d’assurer sa pertinence). Néanmoins, le point de vue considérant que le renforcement des mesures déjà existantes peut suffire (compte tenu d’une part de la létalité qui demeure très faible du virus et d’autre part des conséquences délétères d’un confinement sans parler de la lenteur de la vaccination) demeure toujours défendable. Parmi ces renforcements, pourrait figurer le déploiement du masque FFP2 que certains défendent aujourd’hui, telle l’élue parisienne Marie-Claire Carrère Gee (LR), dans une tribune publiée dans le Monde. L’isolement plus systématique des patients infectés apparaît également souhaitable : le Haut conseil de la santé publique considère ainsi dans un avis récent que désormais tout soignant infecté doit éviter tout contact avec ses patients et collègues, alors qu’une dérogation au printemps permettait aux sujets asymptomatiques de poursuivre leur activité dans certains cas. Mais une telle mesure aura très rapidement pour effet une diminution des ressources thérapeutiques disponibles et induira une nouvelle fois de se poser la question de mesures plus strictes.

Un jour sans fin.

Aurélie Haroche

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Vos réactions (1)

  • Qu'est-ce qu'un "confinement" ?

    Le 05 février 2021

    Ce concept a été inventé pour justifier des procédures bureaucratiques assez absconses, pour ne pas dire plus. L'idée centrale est d'interdire aux personnes saines de circuler, sauf à produire une "attestation" que le monde entier nous envie, document ubuesque mais dont la vertu principale est d'autoriser la maréchaussée à prélever une dîme aux contrevenants ; l'autre effet remarquable étant d'interdire totalement aux mêmes de fréquenter d'innombrables espaces en plein air.

    En réalité, la simple hygiène sociale étant imposée, la conjonction d'un couvre-feu à 18h, d'une fermeture des locaux recevant du public à l'exception de ceux qui vendent des produits essentiels à la survie, du télétravail pour tous les secteurs où il est possible, suffit à l'évidence pour obtenir les mêmes résultats qu'un "confinement".

    Pour faire mieux, l'unique chose qu'il faudrait ajouter est l'isolement contraint, immédiat et contrôlé durant une semaine, de toutes les personnes susceptibles d'être infectées - soit qu'elles aient été en contact avec un malade, soit bien entendu qu'elles aient des symptômes évocateurs. Encore faut-il s'en donner vraiment les moyens.

    Notons, pour l'anecdote, qu'il est cocasse qu'on trouve légitime de produire des "attestations sur l'honneur" sous peine d'amende, mais qu'on juge attentatoire aux libertés de permettre des contacts interhumains aux personnes qui auraient un certificat de vaccination.
    Il est vrai qu'on n'est plus à une polémique près.

    Dr Pierre Rimbaud

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