
Des taux de vaccination élevés mais qui pourraient l’être plus encore
Après quelques frayeurs au printemps dernier, concernant notamment la vaccination dans les établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes, les taux obtenus permettent aux directions d’établissements et aux autorités d’aborder cette semaine décisive avec une certaine sérénité. Les derniers chiffres publiés par Santé publique France le 7 septembre font état d’une vaccination complète de 83,9 % des personnels soignants salariés en EHPAD, 84,1 % de ceux en établissements de santé et de 91,1 % des professionnels libéraux. Concernant la première dose, les couvertures atteignent respectivement 88,6 %, 88,1 % et 93,9%. Ces taux pourraient, notamment dans les établissements, être encore plus élevés ce 15 septembre : un nombre non négligeable de professionnels ont pu en effet se décider à la dernière minute, tandis que certains syndicats ont passé la consigne de transmettre les documents justificatifs le jour J ! Par ailleurs, certains établissements qui ont mis en place une « application » notent pour certains personnels des difficultés d’utilisation de ce dispositif. De fait, un sondage IPSOS pour Bercy réalisé du 30 août au 1er septembre signalait que parallèlement aux 90 % des salariés de la fonction publique hospitalière affirmant avoir déjà reçu une première dose, 6 % avaient pris rendez-vous pour commencer leur parcours vaccinal, 1 % affirmait vouloir le faire et seuls 1 % assuraient qu’ils ne se feraient pas vacciner.Les premières lettres recommandées arrivent
Si les taux sont donc élevés, il existe cependant un certain nombre de réfractaires, face auxquels les contrôles et les sanctions commencent à s’organiser. Dans les hôpitaux, rappelle la Fédération hospitalière de France : « Chacun sera responsable de la vérification des justificatifs de ses propres employés ». C’est également la même règle qui s’applique dans tous les EHPAD qui, s’ils emploient des personnels ne satisfaisant pas à l’obligation vaccinale (infraction qui serait constatée lors d’un contrôle de l’ARS), s’exposent à une sanction allant jusqu’à un an d’emprisonnement pour les responsables et 9 000 euros d’amende. Concrètement, via l’application du passe sanitaire, les établissements ont déjà pu commencer une certaine forme de contrôle. Ils disposent ainsi d’une estimation du nombre de personnes qui pourraient devoir faire l’objet d’une éviction dès mercredi. Des rétroplannings de suspension ont ainsi déjà été préparés dans la plupart des hôpitaux et EHPAD. La veillée d’arme a ainsi commencé dès la semaine dernière où des mails généraux de rappel ont parfois été envoyés, comme aux Hôpitaux civils de Lyon où il a notamment été signalé que des créneaux de vaccination étaient spécialement réservés pour les personnes non encore vaccinées. Des SMS ont également été utilisés. Enfin, les premières lettres recommandées seront reçues dès aujourd’hui. Les suspensions doivent en effet prendre effet dès mercredi et les mises à pied ne pourront alors être levées qu’après la vaccination complète. Seules les personnes en congé de maternité ou en arrêt de maladie ne se verront pas appliquer la même date butoir. Et si certains non vaccinés se persuadent qu’il suffirait de « tenir » jusqu’au 15 novembre (fin théorique, mais de plus en plus hypothétique, du passe sanitaire,), gouvernement et directions rappellent que l’obligation vaccinale contre la Covid pour les soignants est pour sa part pérenne.Suspensions de remboursement en ville
Et en ville ? La situation est moins précise : la publication imminente d’un décret est attendue. Néanmoins, on le sait, les contrôles seront effectués par les Agences régionales de santé. Ces dernières recevront tous les quinze jours de la part de l’Assurance maladie le fichier des professionnels de santé libéraux n’ayant pas entamé leur parcours vaccinal. En théorie, par ailleurs, ceux dont le schéma vaccinal ne serait pas complet devrait avoir à présenter le résultat d’un test PCR toutes les 72 heures (mais les conditions d’application de cette règle ne sont pas encore connues). Les professionnels ne respectant pas l’obligation de vaccinale devront donc cesser leur activité. Pour s’assurer de la réalité de cette suspension, les prises en charge par l’Assurance maladie seront suspendues. Par ailleurs, des contrôles aléatoires seront réalisés par les Agences régionales de Santé (ARS) qui pourraient aboutir en cas de constatation d’infraction à une amende de 135 euros, pouvant s’élever à 1 500 euros en cas de récidive et à 3 750 euros et six mois d’emprisonnement si la violation était observée une troisième fois. Des sanctions disciplinaires pourraient également s’ajouter à ces mesures (d’autant plus que les ARS transmettront aux instances ordinales les noms des professionnels non vaccinés) : cependant les Ordres se sont encore montrés discrets sur ce point.Inquiétudes dans les EHPAD
Si la Fédération hospitalière de France (FHF) s’est félicitée
qu’aucun moratoire n’ait été accordé, faut-il craindre que la
poignée de récalcitrants n’entraîne des désorganisations ? C’est ce
qu’affirment les syndicats FO, Sud et la CGT qui organisent des
manifestations demain pour protester contre l’obligation vaccinale.
Mais la FHF se refuse à tout alarmisme : la plupart des
établissements signalent que la plus grande part de récalcitrants
sont des responsables administratifs ou techniques, ce qui ne
devrait pas avoir d’impact sur la continuité des soins. D’ailleurs,
la FHF met déjà en garde contre l’instrumentalisation de quelques
cas particuliers.
Panique en Guadeloupe et en Martinique ?
Plus problématique encore est la situation en Martinique et en Guadeloupe, où la part de personnels des établissements de santé primo-vaccinés ne dépasse pas comme en population générale 30 %. Des manifestations et des appels à la grève ont été lancés. Au-delà de leur refus de l’obligation, les contestataires signalent l’ambiguïté qui existe sur la date d’entrée en vigueur de la mesure aux Antilles. En effet, le 26 août, Olivier Véran qui s’était rendu sur place avait affirmé que l’entrée en vigueur serait repoussée dans ces territoires, compte tenu de l’impossibilité de se priver d’une partie des personnels face à la situation épidémique. Mais aujourd’hui, la directrice de l’Agence régionale de Santé, Valérie Denux réfute l’idée qu’une dérogation ait été accordée aux Antilles et préfère parler d’une application progressive, tout en affirmant que la date du 15 septembre constituera en Martinique et en Guadeloupe une étape cruciale comme ailleurs.Aurélie Haroche