
Paris, le vendredi 4 août 2023 – L’abandon de la quasi-totalité des indicateurs épidémiologiques rend difficile la surveillance de la Covid-19.
Nombre de contaminations par jour, de patients en réanimation, de décès quotidiens…pendant trois ans, ces données épidémiologiques sur la Covid-19 ont été scrutées à la loupe par les médecins, les décideurs politiques et les Français en général, leur variation étant bien souvent la cause de l’assouplissement ou du durcissement des mesures sanitaires régissant nos vies, en ces temps déjà lointains. Mais depuis la très forte baisse d’intensité de l’épidémie de Covid-19 (et même sa disparition serait-on tenté de dire), ces données ont été peu à peu laissées de côté par les responsables de santé publique.
Jusqu’à finalement leur disparition : depuis le 1er juillet dernier, en application de la loi de sortie de l’état d’urgence sanitaire du 30 juillet 2022, le système SI-DEP, qui centralisait les résultats de tous les tests antigéniques et PCR, ainsi que le système SI-VIC, recensant passages aux urgences et hospitalisations (conventionnelles et en réanimation) des patients atteints du Covid-19, n’existent plus. Il est donc désormais impossible de suivre jour par jour l’évolution de l’épidémie, au grand dam des épidémiologistes (et des obsessionnels). Le site Covid Tracker, qui regroupait toute ces données en une seule source, n’est d’ailleurs plus mis à jour depuis le 31 mars.
Une surveillance maintenue mais parcellaire
Toute surveillance de cette maladie qui a chamboulé la vie des Français durant deux ans n’a pas cessé pour autant. Des données certes beaucoup moins exhaustives sont encore produites et disponibles. Santé Publique France (SPF) peut ainsi s’appuyer sur le dispositif de surveillance syndromique SURSAUD, qui regroupe trois indicateurs : les passages aux urgences dans les 600 services participant au dispositif OSCOUR, les consultations auprès d’une soixantaine d’associations SOS Médecins ainsi que les données de mortalité de 3 000 communes recueillis par l’Insee. Selon SPF, ces données recouvrent 86 % de l’activité des urgences, 90 % de celle de SOS Médecins et 80 % des décès quotidiens en France.
De plus, SPF peut également s’appuyer sur la surveillance génomique réalisée par le consortium de laboratoires Emergen, ce qui devrait en principe permettre de détecter l’apparition d’éventuel nouveaux variants du SARS-Cov-2. Au moment de la disparition du SI-DEP et du SI-VIC, SPF a par ailleurs annoncé qu’elle mettrait à disposition (à partir d’une date encore non précisée), des « indicateurs de surveillance virologique publiés à une fréquence hebdomadaire aux niveaux national, régional et départemental ». Ces données virologiques devraient être issues des déclarations des biologistes et des médecins ayant connaissance d’un cas de Covid-19, qui est devenue le 1er juillet dernier une maladie à déclaration obligatoire (MDO).
Les passages aux urgences pour Covid-19 en hausse de 26 %
Les données du système SURSAUD permettent donc, bon an mal an, de surveiller l’évolution de la circulation de la Covid-19. Selon ces données, il semblerait que la France soit touchée actuellement par une nouvelle « vague » épidémique. Durant la semaine du 24 juillet, les passages aux urgences pour suspicion de Covid-19 ont ainsi augmenté de 26 % selon le réseau Oscour. Ces passages aux urgences restent cependant en nombre relativement faible par rapport aux années précédentes ou même par rapport au printemps dernier qui avait connu une légère augmentation des suspicions de cas de Covid-19. Les consultations SOS Médecins pour Covid-19 sont également en hausse de 21 %.
La France n’est semble-t-il pas le seul pays à être touché par cette « vague fantôme », beaucoup plus difficile à surveiller que les autres. Les données hospitalières au Royaume-Uni et aux Etats-Unis font également état d’une hausse des hospitalisations de patients atteints de la Covid-19 ces dernières semaines.
Tant que les soubresauts de la Covid-19 restent limités, ces indicateurs parcellaires devraient être considérés comme suffisants pour surveiller une maladie qui a fortement perdu de sa gravité. Seule une vague d’une grande ampleur avec des formes graves fréquentes pourrait conduire les autorités à rétablir une surveillance continue de l’épidémie… pour le plus grand bonheur des épidémiologistes.
Quentin Haroche