Téléthon : un "14 juillet en hiver"

Paris, le vendredi 4 décembre 2015 – Comment promouvoir une opération caritative de grande ampleur, supposant une mobilisation de la population dans des dizaines de villes en France, des challenges sportifs et autres rassemblements, alors que le pays vient d’être frappé au cœur et vit depuis sous le régime de l’Etat d’urgence ? Sur la longue route des défis relevés depuis près de trente ans par l’Association française contre la myopathie (AFM), cette épreuve est vécue à l’instar des autres : avec détermination et avec la conviction que le Téléthon est devenu une institution nationale, totalement incontournable,  à laquelle les Français demeureront, en dépit des circonstances, toujours fidèles. « Dans le contexte difficile que connaît la France, plus que jamais, les valeurs de l’AFM-Téléthon – Refuser, Résister, Guérir – trouvent une résonnance. Notre pays a besoin de ce "14 juillet en hiver" de cette fête de la solidarité et de la générosité » a ainsi défendu cette semaine la présidente de l’AFM, Laurence Tiennot-Herment. Quelques modifications dans le programme initial ont cependant été nécessaires pour s’adapter aux impératifs de sécurité : le grand plateau de l’émission, installé habituellement au cœur de Paris sur le Champ de Mars a été déplacé à l’hippodrome de Longchamp, tandis que de nombreuses manifestations seront solidement encadrées par des services de sécurité et que le virtuel devrait permettre de pallier les situations dans lesquelles les rassemblements n’ont pas été possibles. Ainsi, la traditionnelle marche des maladies rares, annulée, est remplacée par différentes opérations sur les réseaux sociaux.

Permettre à un enfant de jouer comme les autres

Cette organisation particulière n’empêchera pas l’équipe entière du Téléthon, cette année parrainée par le chanteur Marc Lavoine, de mettre en lumière les nouvelles victoires des travaux financés grâce aux fonds récoltés chaque année. L’accent devrait notamment être mis sur les premiers résultats d’un essai lancé en 2010 concernant le syndrome de Wiskott-Aldrich. L’introduction du gène sain grâce à un vecteur lentiviral développé et produit par Généthon, parallèlement à une chimiothérapie destinée à éliminer les cellules malades des jeunes patients, a permis d’obtenir des résultats très encourageants chez les six enfants inclus depuis suffisamment longtemps. L’eczéma et les infections graves ont notamment été éliminés, comme chez Sethi, jeune garçon de cinq ans, qui après avoir vécu ses premières années dans le plus grand isolement peut désormais mener une vie presque normale. Il sera, avec sa mère, l’un des ambassadeur de ce Téléthon, comme le symbole des réussites de cette entreprise, même si des bémols existent. « Le taux de plaquettes corrigées est variable d’un malade à l’autre » note en effet l’AFM.

Voir à long terme

A l’instar des années précédentes, le Téléthon, s’intéressera également aux essais concernant des maladies ophtalmologiques graves. Dans l’amaurose congénitale de Leber, les résultats obtenus grâce aux essais initiés il y a trois ans et demi, perdurent. Certains patients souhaitent d’ailleurs désormais  qu’on traite leur deuxième œil. Dans ce sillon, un essai de phase 1 visant à évaluer un protocole clinique de thérapie cellulaire dans les rétinopathies pigmentaires a été lancé l’année dernière par l’équipe du professeur Sahel directeur de l’Institut de la Vision.

Avoir à cœur de montrer l’ensemble de sa force

Soucieux de montrer l’intérêt global des recherches qu’il finance, après avoir été visé il y a plusieurs années par des commentaires acerbes lui reprochant une monopolisation de l’attention au bénéfice de maladies rares (qui toutes ensemble concernent cependant de très nombreuses familles), le Téléthon se concentrera également sur les premiers résultats d’un essai conduit par le professeur Philippe Menasché, destiné à évaluer la pertinence d’une thérapie cellulaire à base de cellules souches embryonnaires chez des patients atteints d’insuffisance cardiaque. Dans cette étude, les cellules souches dérivées de cellules pro génitrices cardiaques sont présentées sous forme d'un "patch" constitué grâce à un gel de fibrine. L’une des patientes incluse dans l’étude, Jacqueline, viendra témoigner qu’elle se porte bien, même s’il est aujourd’hui trop tôt pour tirer des conclusions définitives. Les victoires du Téléthon ne se découvriront pas uniquement à travers les témoignages des patients et des médecins, mais s’illustreront par la présentation de la nouvelle plateforme de production de l’AFM, d’une plus grande ampleur encore que le Généthon Bio Prod, tandis que sera également évoquée la multiplicité des approches défendues par le Téléthon, quand sa prédilection pour la thérapie génique a parfois été critiquée par le passé.

L’autre combat du Téléthon

Enfin, les enfants atteints de maladies neuromusculaires, qui étaient à l’heure de la création du Téléthon en 1987 le cœur de cible de cette opération, compteront également parmi les ambassadeurs de l’édition qui s’ouvre ce soir. Atteinte d’amyotrophie spinale, qui la contraint entre autres de se déplacer en fauteuil roulant depuis l’âge de 10 ans, Marie, jeune fille dynamique de 19 ans tiendra un discours non pas uniquement centré sur la recherche, mais également sur la lutte contre la stigmatisation des personnes handicapées. Le slogan qui souligne l’affiche où elle pose très souriante résume bien cet appel : « Ne me dévisagez pas, encouragez moi ».

Parvenir à faire changer le regard sur les maladies rares et invalidantes constitue l’une des autres victoires du Téléthon, même si, comme en matière de recherches, les combats sont loin d’être tous gagnés et que certains espoirs sont déçus.

Aurélie Haroche

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